Jean-Marc Andrieu vient de réaliser un rêve datant de plusieurs années : redonner vie à une pastorale languedocienne signée Mondonville (1711-1772). Pour cela il a dû compléter la partition et faire d’incroyables recherches que seul un passionné peut entreprendre. Le résultat est une pure merveille.
Donnée sous forme concertante elle nous fait croiser tout d’abord lors du traditionnel Prologue, rien moins qu’une légende toulousaine du XVème siècle : Clémence Isaure, fondatrice des Jeux floraux de Toulouse et… patronne de la langue d’oc. C’est donc, hormis ledit Prologue, en occitan que les trois actes de cette adaptation d’une fable de La Fontaine est chantée. Une adaptation en effet qui permet une fin heureuse, contrairement à l’original. L’histoire du berger Daphnis, follement amoureux de la belle Alcimadure connaît en effet ici un dénouement charmant grâce à l’intervention machiavélique du frère d’icelle : Jeanet.
Machiavélique est aussi l’ouvrage de Mondonville car, en pleine Querelle des Bouffons opposant la tradition française aux nouvelles formes italiennes, celui-ci ne trouve rien de moins comme subterfuge pour tromper son auditoire que de faire chanter cette pastorale en… occitan, avec toute la suavité, la musicalité et la rondeur, pour ne pas dire l’italianité de cette langue.
Pour nous faire entendre cet ouvrage, Jean-Marc Andrieu a réuni des spécialistes de très haut niveau. A commencer par son orchestre : Les Passions et le chœur de Joel Suhubiette : Les Eléments. Nous sommes ici en présence de virtuoses incontestés de ce répertoire. S’il fallait vraiment s’en convaincre il n’y avait qu’à écouter l’intervention sidérante des deux cornistes ! Après un Prologue, en français, chanté par une Hélène Le Corre que l’on aurait peut-être souhaitée plus vibrante dans ce véritable manifeste selon lequel le badinage entretiendrait la flamme de l’amour, l’opéra peut commencer. Le Daphnis du haute-contre François-Nicolas Geslot est une merveille de tous les instants tant dans son chant irréprochable de virtuosité et de style que dans l’émotion qu’il sait en dégager, quitte à s’investir « scéniquement ». A ses côtés, l’intraitable Alcimadure a la voix du dessus (soprano) Elodie Fonnard, une voix vaillante, charnelle, dont les accents hautains et moqueurs vont précipiter le pauvre berger vers des abysses sans fond. Puis vient le tour d’intervenir de Jeanet, ici le jeune taille (ténor) Fabien Hyon. Le timbre est solaire, la projection percutante, le musicien habile. Ses interventions apparaissent alors comme des moments d’une ampleur lyrique qui tracent parfaitement le portrait de ce personnage manipulateur de comédie. Nous le retrouverons sur la scène du Capitole la saison prochaine. Rien d’étonnant.
Une belle résurrection longuement et justement ovationnée par le public.
Robert Pénavayre
une chronique de ClassicToulouse
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> Entretien avec Jean-Marc Andrieu