Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
L’Ange bleu de Joseph von Sternberg
En 1925, dans une petite ville d’Allemagne, un vieux professeur de lycée, Immanuel Rath, tente de faire régner la discipline chez ses turbulents élèves. Après avoir confisqué à l’un d’eux des photos osées, il apprend que certains lycéens fréquentent nuitamment un cabaret malfamé nommé « L’Ange bleu ». Afin de ramener ces brebis égarées dans le droit chemin, Rath se rend à son tour dans l’établissement où il découvre une jeune chanteuse surnommée Lola-Lola qui se produit sur scène avec des poses très suggestives. Le célibataire cède à ses charmes, tombe amoureux et veut l’épouser. Si des éclats de rire de Lola-Lola accueillent d’abord la demande en mariage, celle-ci accepte et va débuter pour le pauvre homme une cruelle descente aux enfers.
L’Ange bleu commence comme une comédie ou un vaudeville et finit en tragédie. Un magicien est le directeur de la troupe. Un clown passe et repasse. Des portes claquent. Lola-Lola, légèrement potelée, chante en bas et porte-jarretelles avec bonne humeur. Quelques années plus tard, elle appelle son mari « le vieux », le trompe aux yeux de tous. Rath, qui a perdu son poste de professeur, devient un clown dont on se moque et que l’on humilie. Jusqu’à l’issue fatale.
Naissance d’une icône
La star de L’Ange bleu était l’acteur allemand Emil Jannings, vedette du muet, comédien fétiche de Murnau et de Lubitsch. Il retrouvait ici Josef von Sternberg qui l’avait dirigé à Hollywood en 1928 dans Crépuscule de gloire (Jannings décroche alors le premier Oscar du meilleur acteur), mais deux ans plus tard leur nouvelle collaboration va révéler une autre star : Marlène Dietrich. Elle n’a pas encore la beauté incandescente ni l’aura qui en feront l’une des actrices les plus iconiques de l’histoire. Cependant, la fascination agit déjà sur le public en Europe comme aux Etats-Unis. A Hollywood, Von Sternberg la sublimera dans six autres longs métrages (Cœurs brûlés, Agent X27, Shanghaï Express, Blonde Vénus, L’Impératrice rouge et La Femme et le pantin). Cette collaboration magique ne doit pas faire oublier que Marlène Dietrich tournera aussi avec Ernst Lubistch, Raoul Walsh, René Clair, Billy Wilder, Alfred Hitchcock, Fritz Lang ou Orson Welles tout en menant une longue carrière et brillante de chanteuse.
Adapté d’un roman naturaliste d’Heinrich Mann, L’Ange bleu porte encore les traces de l’expressionnisme allemand. On peut y voir également un tableau de la décomposition de la République de Weimar à l’instar de M le Maudit réalisé par Lang un an plus tard. Sa noirceur et sa cruauté annonçaient des orages. On connaît la suite.
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