Coupez ! un film de Michel Hazanavicius
Le dernier long métrage du cinéaste Michel Hazanavicius, présenté hors compétition au Festival de Cannes 2022, est une jubilatoire réussite conjuguant film d’épouvante (pour rire) et réflexion sur le cinéma.
Les 32 premières minutes du film de Michel Hazanavicius sont un plan séquence, à l’instar de l’original japonais : Ne coupez pas ! dont il est le remake assumé. Nous sommes dans une friche industrielle au cœur du tournage d’un film à tout petit budget, un film d’horreur, de zombies plus précisément. Mais voilà qu’au beau milieu du tournage, ce sont de vrais zombies qui font leur apparition.
Alors, comment vous dire sans spoiler, sinon qu’au bout de ce fameux plan séquence, un autre film démarre. Et avec lui, c’est tout un hommage vibrant aux métiers du cinéma. A tous les métiers. Le réalisateur tout d’abord, ici Romain Duris, en proie aux exigences de la production, doit faire fi de ses projets artistiques. La maquilleuse, Bérénice Bejo, se trouve devant cet Himalaya qu’est pour elle un film de morts-vivants. Grégory Gadebois, le cameraman, doit conjuguer son activité avec une addiction certaine pour l’alcool. Finnegan Oldfield, l’acteur, la star, discute de tout et pique des crises de nerfs homériques, à l’image de celles du réalisateur d’ailleurs. Matilda Lutz, l’actrice un peu timide se doit d’exploser à l’écran, et c’est très dur… Sébastien Chassagne, l’assistant, doit aussi jouer le zombie qui va se faire découper en morceau. Raphaël Quenard, l’ingé-son, a du mal à maîtriser une colique envahissante et plutôt…bruyante. Jean-Paul Zadi, le compositeur, est un peu/beaucoup perdu sur ses platines alors que le scénario n’en finit pas de changer.
Autant l’avouer, on sort les zygomatiques tétanisés. Mais le génie de Michel Hazanavicius c’est de nous avoir présenté un tournage à deux balles dans toute sa complexité, scrutant les comportements, faisant d’un plateau de tournage l’univers de la Comédie humaine. Le film d’origine est un film d’étudiants tourné en 6 jours. Celui-ci a été réalisé en 6 semaines avec un budget de 4 millions d’euros. Autrement dit un trait de plume par rapport aux méga-productions hollywoodiennes. C’est aussi et peut-être surtout cela qui rend ce film si direct, si attachant, si authentique dans sa démarche, tout cela plus l’immense talent de Michel Hazanavicius. Tous les comédiens sont plus qu’épatants et il y a fort à parier que le dernier opus de ce réalisateur devienne culte.
A voir pour une sérieuse pinte non pas de sang mais de rigolade.
Michel Hazanavicius – Existe-t-il une vie après The Artist ?
Après un long passage par la petite lucarne, Michel Hazanavicius finit par réaliser son premier long en 2004. Il a 37 ans. Des hauts et des bas, il va en connaître. Retenons les succès d’autant qu’au nombre de ceux-ci il y a ce film couvert, écrasé, submergé par un tsunami de récompenses planétaires : The Artist, en 2011. Il y aura aussi ses deux opus, absolument désopilants, autour du fameux OSS 117. Aujourd’hui, après le film sous rubrique, il se lance dans l’animation avec un film qui sortira, en principe, fin 2022 : La Plus Précieuse des Marchandises. On a hâte !