Seule la terre est éternelle, un film de François Busnel et Adrien Soland
L’animateur de la célèbre émission télévisuelle littéraire « La Grande Librairie » ne pouvait que se passionner pour le plus grand romancier et poète américain de son temps : Jim Harrison. Il décide donc, avec l’aide d’Adrien Soland, réalisateur, de suivre les pas de l’écrivain lors d’une déambulation en toute liberté au cours de laquelle Jim Harrison va nous faire découvrir son Amérique, de l’Arizona au Montana et jusqu’à la frontière avec le Mexique.
Le concernant, la caméra a opté pour le plein cadre, avec cette figure défoncée autant par l’âge, il a alors 78 ans, que par ce tesson de bouteille qui le priva tout jeune d’un œil, par cette bouche édentée et ce souffle court qui ne l’empêche pas d’aspirer la fumée de cigarettes sur cigarettes. Sa démarche, déjà précautionneuse, scande l‘automne d’une vie qu’il a voulue au plus près de la nature. Dans celle-ci il a puisé sa force et son rythme. Et l’on ne peut alors, en l’écoutant, qu’entendre l’écho puissant du Faust imaginé par Hector Berlioz dans sa Damnation : « Nature immense, impénétrable et fière/ Toi seule donne trêve à mon ennui sans fin/ Sur ton sein tout puissant je sens moins ma misère/ Je retrouve ma force et je crois vivre enfin ».
Tourné pendant trois semaines à la fin de l’été 2015, ce long métrage évoque par ses images et les commentaires de l’auteur de « Légendes d’Automne », le monde sauvage et splendide dans lequel ses héros parcourent son œuvre. Au passage, Jim Harrison nous parle du génocide des Indiens d’Amérique, mais aussi et sans aucune économie, de l’Amérique contemporaine… La seconde partie de ce film devait être réalisée au début du Printemps de l’année suivante. Jim Harrison a rejoint les Grandes Prairies le 26 mars 2016, nous laissant une œuvre immense, non seulement littéraire mais peut-être et surtout une magistrale réflexion sur un monde, le nôtre, fait de vitesse et d’absurdité, de violence et de destruction. Loin de toute morale, ce qu’il nous livre ici, et il le savait, c’était son testament. On en sort pas indemne. Tout simplement magistral !