L’édito contenu dans le programme de cette soirée, signé par Claude Scavazza, Président de l’association Les Arts Renaissants, est sans ambigüité sur le sujet. L’un des marqueurs forts de leur programmation est de faire une place à des étoiles montantes de la musique classique. Pour ouvrir la saison 21/22, Claude Scavazza a invité à cet effet un jeune toulousain de 15 ans : Constant Despres. Lauréat de plusieurs prix, star de l’émission télévisée Prodiges, ce pur produit du Conservatoire toulousain n’en finit plus de gravir les échelons. Il se présente cette fois, entouré par l’Orchestre de Chambre Occitania fondé par Bernard Soustrot, devant un Auditorium Saint-Pierre des Cuisines abondamment garni, un miracle en ses temps de pandémie (!), avec deux œuvres de caractères bien différents.
Tout d’abord il est le claviériste du Septuor en mi bémol majeur pour piano, trompette et cordes op 65 de Camille Saint-Saëns. Créé en décembre 1880, cet ouvrage connaît tout de suite un énorme succès. Le compositeur, âgé de 45 ans, est déjà au faîte de son activité créatrice et nous donne à entendre une musique au romantisme échevelé. L’œuvre suivante est d’un tout autre caractère puisqu’il s’agit du célèbre Cinquième concerto en fa mineur pour piano et cordes BWV 1056 de Johann Sebastian Bach. Hasard de la programmation, le Cantor de Leipzig a également 45 ans lorsqu’il compose ce concerto dont le Largo en a fait toute la célébrité. Ce mouvement donne l’occasion au soliste d’exprimer une profonde émotion, contrairement à l’Allegro et au Presto qui l’entourent, véritables « mécaniques » musicales d’une rigueur diabolique.
A la demande du public, Constant Despres nous offre en bis l’Etude transcendante N° 10 de Franz Liszt, pièce aussi virtuose et torrentielle que romantique dans laquelle le jeune pianiste, libéré de toute contrainte stylistique, déploie un jeu chaleureux, brillant, effervescent, empli de couleurs et d’une formidable dynamique.
Après l’entracte, l’Orchestre revient avec la Suite espagnole pour trompette et cordes d’Isaac Albéniz et la Simple Symphony pour cordes opus 4 de Benjamin Britten. Le numéro de l’opus suffit à le situer chronologiquement dans l’œuvre de cet immense compositeur britannique. En effet, Benjamin Britten a tout juste 20 ans lorsqu’il compose cet ouvrage en très grande partie tiré de compositions antérieures alors qu’il avait à peine… une dizaine d’années. Semble-t-il très facile à interpréter, il est souvent programmé par des ensembles amateurs. Autant le dire tout de suite, l’Orchestre de Chambre Occitania nous emporte ici dans sa joie évidente à jouer cette symphonie dont le second mouvement, intitulé Playfull Pizzicato, évoque irrésistiblement une danse baroque. Vivement applaudi, l’Orchestre revient pour une Danse roumaine de Bela Bartók aux mélismes d’Europe Centrale toujours aussi ensorcelants. Notons que dans cet Ensemble, d’une jeunesse étonnante vue sa discipline et sa musicalité, se détache le superbe violoncelle d’une rondeur envoûtante de Lucile Gambini. Toutes ses interventions provoquèrent de véritables frissons dans l’assistance.
Applaudissons à cette ouverture de saison tout en attendant avec impatience le second concert, celui qui réunira le 14 décembre prochain en la Basilique Notre-Dame de la Daurade, rénovée faut-il le rappeler, rien moins que le Café Zimmermann, Les Sacqueboutiers et l’Ensemble Clément Janequin pour un somptueux programme de Noël intitulé bien sûr Magnificat !
Tous à vos calendriers et à vos téléphones car il n’y aura pas de place pour tout le monde !
Robert Pénavayre
une chronique de ClassicToulouse