Nomadland, un film de Chloé Zhao
Couvert des prix les plus prestigieux du 7è art (Lion d’or, 4 Bafta et 3 Oscars), le film de Chloé Zhao se devait de figurer dans nos rubriques. En salle depuis le 9 juin, il continue d’attirer la foule des cinéphiles. Pour longtemps encore.
2008, année d’une crise financière hors normes qui va précipiter les plus fragiles dans des situations inextricables de précarité. Certains, ayant à peu près tout perdu, emploi et maison entre autres, décident de partir sur les routes. Sans but aucun, ils vivent de petits boulots glanés au gré de leur périple (Amazon, camping, grande surface…). Leur domicile, un van, est dorénavant sur quatre roues. Dans cette sorte de pèlerinage sans péché à racheter, ces nouveaux nomades se retrouvent, vivent un moment ensemble, se quittent. Chloé Zhao confie certes le rôle principal de ce road-movie à une actrice professionnelle, Frances McDormand, mais elle va l’entourer de véritables exclus du système. Ils vont se raconter devant une caméra jamais racoleuse ni voyeuse, mettant à nu des destins brisés certes, mais aussi, et peut-être surtout, une folle envie de vivre et un optimisme sans limites, une empathie sans faille vers son prochain, son égal, qui font encore espérer dans l’âme humaine. Alors que tout s’écroule autour d’eux, ils continuent d’avancer imperturbables pèlerins vers un monde meilleur. Ces rencontres intensément chaleureuses vous bouleverseront, leur authenticité prenant le pas sur la forme même du récit. Bien sûr ce ne pouvait être qu’un film contemplatif, fait de rien et pourtant rempli à ras bord de toute la misère humaine. Dans ces paysages sans fin, au cœur de nulle part, la vie continue, l’espoir renaît parfois… L’image est somptueuse, la BO, signée Ludovico Einaudi, frôle l’impressionnisme et vous prend le cœur d’une main amicale pour vous accompagner dans ce périple des oubliés de la première puissance économique mondiale.
Frances McDormand, multi-récompensée pour ce rôle, s’est immergée anonymement en amont du tournage dans cette situation, pour s’en imprégner sans fard. Sa prestation est inoubliable. Peu de dialogue ici, le strict nécessaire, mais des regards, des gestes, parfois justes ébauchés mais tellement signifiants. La misère se contente de peu… Chloé Zhao capte tout cela avec une subtilité qui vous nouera la gorge plus d’une fois.
A voir impérativement… sauf à vouloir se priver d’un chef-d’œuvre !
À l’affiche dans votre cinéma : Cinéma ABC – American Cosmograph – Véo Muret – Gaumont Toulouse Wilson – UGC Montaudran – CGR Toulouse Blagnac – Utopia – Gaumont Labège
Chloé Zhao – Des laissés pour compte aux…super-héros !
Pékinoise de naissance, la jeune Chloé quitte l’Empire du Milieu dès ses premiers diplômes en poche. Direction les USA où elle va étudier les sciences politiques et la production cinématographique. En 2015, elle a 33 ans, Chloé Zhao signe son premier long. Il est présenté aux festivals de Sundance et de Cannes avec un excellent retour critique. Après The Rider en 2017, Nomadland voit la cinéaste demeurer, pour son troisième film, sur son terrain de prédilection : les populations marginalisées. Sa maîtrise de la caméra va attirer de grands studios qui lui proposent d’intégrer pour son prochain film (Les Eternels, sortie prévue fin 2021) l’univers des super-héros ! Assez étonnant, non ? D’autant que le suivant sera un remake de…Dracula ! Décidément…