A l’orée d’une nouvelle mandature et plus particulièrement en cette période de fortes tensions et d’incertitudes dans tous les domaines, il nous a semblé opportun d’interroger celui qui a en mains les destinées de la Culture à Toulouse : Francis Grass – Adjoint au Maire de Toulouse, Délégué à la Culture. Manière de se rassurer.
Francis Grass – Photo Patrice Nin –
Classictoulouse : A la suite de la réélection de Jean-Luc Moudenc à la Mairie de Toulouse, vous avez été reconduit dans votre délégation à la Culture avec, cette fois, en prise directe, le Théâtre et l’Orchestre du Capitole de Toulouse, un champ d’activité qui était confié, sous votre autorité, à Marie Déqué auparavant, celle-ci étant aujourd’hui partie pour le Centre National de la Musique à Paris. Quels sont vos projets et ambitions pour ces deux institutions musicales qui forment le socle classique de la culture toulousaine ?
Francis Grass : Avant de répondre à vos questions, je voudrais vous dire que je suis évidemment honoré et très heureux d’être à nouveau en charge, et je devrais dire au service de la Culture, au côté de Jean-Luc Moudenc pour ce nouveau mandat.
La Culture à Toulouse a la caractéristique essentielle d’une extraordinaire diversité, permettant de toucher des publics nombreux de toutes générations, et qu’elle a vocation à irriguer tous les quartiers. Et ce qui est remarquable, c’est que dans plusieurs de ces registres nous touchons à l’excellence, c’est le cas avec le Théâtre et l’Orchestre du Capitole, j’y reviendrai, mais aussi par exemple dans le domaine de la Culture scientifique, où en quelques années Toulouse est devenue une référence avec plus d’un million de visiteurs par an, dans ses 5 établissements (Museum, Cité de l’Espace, Quai des Savoirs, Aeroscopia et Envol des Pionniers). Mais je pourrais aussi citer le Cirque contemporain, le Graph ou les musiques actuelles avec la formation et l’émergence de jeunes artistes donc BigFlo et Oli sont les brillants représentants.
Pour revenir au Capitole, Orchestre National et Théâtre, il s’agit de les maintenir au niveau d’excellence artistique qu’ils ont su atteindre depuis des années, grâce au talent de Tugan Sokhiev, depuis 17 ans à l’Orchestre, et celui des musiciens, et Christophe Ghristi plus récemment côté Opéra, avec l’appui de Kader Belarbi pour le Ballet, et de tous les métiers spécifiques de la production. Bien sûr, le soutien financier de Toulouse Métropole reste déterminant.
Pour ce qui concerne Tugan Sokhiev, évidemment très demandé pour diriger de nombreux orchestres prestigieux, et compte tenu de la confiance qui nous lie, nous discutons pour qu’à l’issue de son contrat qui court jusqu’à mi 2021, notre collaboration se poursuive, jusqu’à ce que nous puissions identifier celui ou celle qui un jour saura prendre le relais. Par ailleurs, tout comme l’Orchestre est National depuis 1981, grâce à Michel Plasson, nous avons l’ambition d’obtenir le label d’Opera National pour le Théâtre. C’est un de nos grands projets.
Enfin, en matière de projet toujours, nous poursuivons l’étude d’un auditorium à la Prison St Michel, une étude qui a franchi l’étape importante de la faisabilité, notamment en concertation avec les habitants du quartier. Par ailleurs, nous engageons pour l’opéra un regroupement à Montaudran des installations techniques et de répétitions, disséminées sur 7 points de l’agglomération avec des mouvements incessants de véhicules, ce qui va considérablement améliorer le bilan carbone. En effet la Culture doit, elle aussi, contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique.
CT : Plus largement, vos responsabilités d’élu ne s’arrêtent pas aux portes de ce répertoire mais couvrent l’ensemble de la Culture. Pouvez-vous nous en donner le détail et l’état des lieux actuels ?
FG : Vous évoquez l’état des lieux de la Culture, et bien sûr tout le monde pense à la situation sanitaire et ses conséquences économiques et sociales.
Je suis bien sûr convaincu que l’activité culturelle doit se maintenir dans toute la mesure du possible, en respectant scrupuleusement les règles sanitaires, d’abord pour des raisons sociales, car la Culture est un domaine économique très important en terme d’emploi. Mais il n’agit aussi d’avoir une Culture vivante, car personne n’a envie d’un monde durablement confiné où tout se fait à travers un écran, même si le numérique est un formidable vecteur pour la Culture.
C’est pourquoi par exemple nous avons organisé cet été les « Instantanés », spectacles vivants dans l’espace public qui ont rencontré un beau succès.
CT : Il faut bien en venir à la situation économique actuelle en France. Les années à venir ont très peu de chances de ressembler aux Trente Glorieuses qui suivirent la fin de la dernière guerre. Et l’on imagine bien que les priorités budgétaires se concentreront vers d’autres secteurs que celui de la Culture. Qu’en est-il aujourd’hui de vos anticipations pour Toulouse dans ce domaine ?
FG : Nous avons voté à la Métropole un plan de relance et de soutien, avec un volet important pour la Culture. Je n’ai pas la prétention d’avoir une lecture économique à moyen et long terme, mais je suis sûr que notre soutien à court terme est indispensable, comme nous l’avons fait en maintenant nos subventions malgré l’arrêt des activités. Sauf cette décision sans précédent dès le début du confinement, beaucoup d’acteurs culturels auraient été en grand danger.
Or la vitalité et la diversité culturelle dont je parle reposent sur notre engagement financier, qui sera maintenu, mais aussi sur le talent de tous ces acteurs culturels que je viens d’évoquer, présents sur notre territoire. Les investissements culturels contribueront pour leur part au soutien de l’activité économique, avec bien sûr nos grands projets St Michel, La Grave ou la Cite de la Danse à Reynerie, mais aussi le Château d’Eau ou le Théâtre de la Digue et la nouvelle entrée des Augustins.
À court terme, je voudrais surtout encourager tous les amateurs de Culture. Allez aux concerts, dans les Musées, au Cinéma, dans les Bibliothèques… toutes les mesures sanitaires sont prises, il n’y a pas plus de risque qu’en faisant ses courses ou en allant au restaurant ou dans le métro.
Entretien recueilli par Robert Pénavayre