Saphia Azzedine publie Mon père en doute encore aux éditions Stock. Une déclaration d’amour tendre et drôle d’une fille à son père.
« Il aurait voulu être un patriarche. Il n’a été d’un bon père. » Tel est le postulat de Saphia Azzedine. Mais quel père ! Un homme simple – dans le bon sens du terme – qui connaît le sens de la tolérance et qui est doté d’une poésie unique. C’est donc une personnalité bien trempée que l’on découvre au fil des pages. Un jeune garçon né dans un Maroc aride, entouré de femmes. Des femmes qu’il observe, tout comme il observe le monde alentour. De ces observations silencieuses, il en gardera une compréhension du monde très sensible. D’abord, il remarquera les inégalités qu’il ne comprendra pas ou mieux qu’il refusera. Il s’en rappellera lorsqu’il deviendra père à son tour. Fille ou garçon, il ne fera jamais de différence. Chacun et chacune aura sa place. Puis c’est un père protecteur qui est décrit. Celui qui veut protéger de l’extérieur. Le nid, la sécurité, c’est à ses côtés, à la maison.
Telle père, telle fille ?
Parallèlement à ce portrait subtil, on découvre également l’enfance de Saphia, entre deux pays, deux visions du monde. Elevée dans l’amour d’un père et dans la peur de l’extérieur. De cette éducation protectrice, Saphia Azzedine tire des pages très drôles et émouvantes qui racontent l’innocence préservée. Elle décrit avec beaucoup de dérision sa relation avec les autres filles de son âge, celles qui savent déjà des choses sur les garçons alors qu’elle est maintenue dans une douce ignorance. Puis ce sont les doutes de l’adolescence, l’envie d’aller voir le monde, de s’y confronter et en même temps la peur de trouver une société brutale. Le parcours du père et de la fille se croisent, se heurtent, s’éloignent, mais toujours se retrouvent. Une valse très poétique qui montre la force de certains liens indestructibles.
Ce sont de magnifiques pages que Saphia Azzedine nous offre pour évoquer ce père unique. Un texte où bienveillance et humour sont toujours présents. Le portrait d’un homme apparemment banal mais qui méritait le bel éloge qui lui est consacré. Tout cela est possible grâce à l’œil vif et à l’écriture pointilleuse de l’auteur qui nous a déjà habitués, dans ses précédents romans, à nous saisir d’une main de fer dans un gant de velours.
Saphia Azzedine, Mon père en doute encore, Stock, 200 p.
AZZEDDINE Saphia © Philippe Matsas
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