Et c’est reparti ! Le Festival International du Film Grolandais de Toulouse, aka le FIFIGROT, débarque à Toulouse, et dans ses alentours, pour la 8e année, du 16 au 22 septembre. Rien de mieux que l’édito de Benoît Delépine pour donner le ton :
Assez ! Assez ! De dieu inexistant ! De fausse démocratie ! Du capitalisme injuste ! Et même de l’anarchisme puéril. Il nous fallait du vrai, du fort, de l’adulte que diable ! Pourquoi les Grolandais ne mériteraient-ils pas un sort aussi enviable que celui de leurs voisins chinois, américains et eusses, qui tous ont choisi un despote plus ou moins malade ? Notre Présipauté, avec son Président auto-élu à vie, n’avait-elle pas la première montré la voie, donnant une fois de plus l’exemple à un monde totalement perdu ? N’est-ce pas ce que les individus, devenus chacun petit dictateur d’eux-mêmes en régnant sans pitié sur leur petit Face Book, sont en droit d’attendre, soit un dictateur à la hauteur de leur mégalomanies réunies ? Si fait.
Le Festival International du Film Grolandais de Toulouse a tenu compte de ses spectateurs devenus fous, rageux et impatients. Cette année, plus de jury. Plus de discussions interminables, de débat inutile, de verbiage vaseux. Le choix de l’Amphore d’Or sera le caprice d’un seul. Celui de Notre Dictateur du Jury. Jean Dujardin a accepté cette charge avec enthousiasme, et, je crois, avec une certaine dose de sadisme. Il va nous faire payer toutes ces années de tergiversations. C’est lui qui a tenu à cette thématique sur les dictateurs fous, mais aussi à celle de cul intitulée « Nazis dans le rétro », tout comme à vanter la poésie servile. Ce qui n’empêchera pas un gros focus à Desproges, un éloge à l’éthylisme, une thématique inélastique surréaliste avec Buñuel et Trouille, des découvertes d’encore jeunes réalisateurs comme Fabrice Du Welz, Sébastien Marnier ou Johannes Nyholm, et des performances, des expos, du théâtre, des rencontres littéraires, des projections dans les bars… Oui. On peut être un dictateur éclairé.
Jusqu’à la fin des temps, que la lumière du fou unique soit !
Donc, fini le jury (à plusieurs), un seul membre, donc un dictateur : Jean Dujardin, YOU-PI ! Mais soyez rassurés, Noël Godin et Jean-Pierre Bouyxou, qui étaient des membres à vie (du jury) sont maintenant des membres à vie (de quoi ? on n’sait pas !),mais ils seront bel et bien là ! Pacôme Thiellement et Nils Bouaziz, qui ne sont pas membres à vie, mais dont l’absence serait une faute de goût, seront là aussi pour respectivement présenter La Guerre de l’âme (le dispositif – épisode 51) + Stupor Mundi Livre 3 : la plus dangereuse rencontre (avec le co-réalisateur Thomas Bertay – p28 du programme) et participer à la table ronde « Cinéma et musique » (p33 du programme). Souhaitons à Nils que la mésaventure avec sa casquette ne se reproduise pas cette année. Et pour restez dans la thématique 2019, je vais faire ma dictateuse pour pointer dans cette programmation – tellement riche qu’elle donnerait le tournis -, ce qui me fait super plaisir et super envie.
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LES FILMS D’OUVERTURE ET DE CLÔTURE
IT MUST BE HEAVEN, de et avec Elia Suleiman – Mention spéciale du Jury de la Compétition du Festival de Cannes 2019
Elia Suleiman fuit la Palestine à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil. La promesse d’une vie nouvelle à New York et Paris se transforme vite en comédie de l’absurde.
Ayant vu ce film durant « Cannes au Gaumont« , ce conte burlesque sur l’identité et ce que signifie « chez soi »est probablement le plus mélancolique des films du réalisateur. Et toujours très grolandais, côté Tati et Roy Andersson ! Cette chanson de la bande-annonce ne vous quittera plus. Le films sort en salles le 4 décembre.
BACURAU, de Kleber Mendonça Filho (le réalisateur de Les Bruits de Recife et Aquarius) et Juliano Dornelles – Prix du Jury de la Compétition du Festival de Cannes 2019
Film que j’ai aussi vu en salles, et que j’aurai plaisir à revoir pour cette clôture explosive ! Dans un futur proche, le village de Bacurau au Brésil est menacé d’une coupure d’eau générale à cause d’un barrage bloqué. Les villageois remarquent quelques jours plus tard que Bacurau a disparu de la carte. Mafieux, prostituées lanceuses d’alerte, miliciens énigmatiques, Bacurau sombre peu à peu dans une chasse à l’homme endiablée. Cette dystopie est une réponse parfaite à Bolsonaro. Cerise sur mon gâteau : l’acteur Udo Kier !
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LES INVITES
JEAN DUJARDIN
Il a dit « Tous les festivals du Groland se doivent de diffuser sur grand écran mon image, capturée par les cinéastes ayant eu l’honneur de fixer mon reflet ». On ne contredit pas un dictateur, qui a un planning très chargé, et viendra présenter (p18 du programme)
– Jeudi soir au Gaumont les deux OSS, OSS 117 : Le Caire, nid d’espions et OSS 117 : Rio ne répond plus !
J’aurais a-do-ré voir Jean Dujardin rejouer cette réplique au Goethe Institut. Pour les adeptes du « on ne peut plus rien dire », Michel Hazanavicius montrait que si, en 2006 et 2009, de la façon la plus belle et drôle possible.
– I FEEL GOOD au nouveau Cinéma Utopia Borderouge le vendredi (bienvenus dans l’aventure grolandaise !), accompagné de Benoît Delépine.
– LE DAIM au cinéma Le Cratère le samedi, du très grolandais Quentin Dupieux avec cette veste qui donne vraiment un style de malade ! Conseil : venez sans la vôtre !
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FABRICE DU WELZ
Enfin FABRICE DU WELZ à Toulouse ! J’aime ses films, son univers (mes Laurent Lucas, Manu Dacosse, Benoît Debie pour ne citer qu’eux), et en entretien, c’est l’un des rares réalisateurs qui ne change pas ses réponses au fil des ans, et qui parle sans langue de bois. C’est donc très très très appréciable de pouvoir le rencontrer et discuter avec lui. Au programme, (p30 et 31 du programme)
– LA FOIRE AGRICOLE, de Patar et Aubier + DES COWBOYS ET DES INDIENS : LE CINÉMA DE PATAR ET AUBIER, de Fabrice du Welz, jeudi à l’ABC.
Inconditionnelle de Panique au village (la série, le film, les spéciaux comme La Rentrée des classes (votez cochon!) ou La Bûche de Noël), le nouveau spécial de Patar et Aubier de 26 min La Foire agricole est donc grandement attendu, et sera suivi du documentaire que Fabrice du Welz a consacré au tandem Patar et Aubier a aussi réalisé Ernest et Célestine.
– ADORATION son dernier film en avant-première à l’American Cosmograph le jeudi soir – sortie en salles le 22 janvier 2020 -, avec Thomas Gioria (le fils de Jusqu’à la garde, meilleur film d’horreur, pour moi, l’an dernier), Fantine Harduin, Benoît Poelvoorde (ex Président du Jury Fifigrot, et voix de Steven dans Panique au village – comme quoi, tout se tient), mon Laurent Lucas.
Paul, un jeune garçon solitaire, rencontre Gloria, la nouvelle patiente de la clinique psychiatrique où travaille sa mère. Tombé amoureux fou de cette adolescente trouble et solaire, Paul va s’enfuir avec elle, loin du monde des adultes…
– CALVAIRE, premier long-métrage de Fabrice du Welz sorti en 2005, et quel film ! La copie belge était passé en 35 mm à l’avant-dernier Extrême Festival à la Cinémathèque de Toulouse. Ce sera la projection en avant-première de la version restaurée au Gaumont Wilson, vendredi à midi (pas certaine qu’il vous ouvre l’appétit par contre, encore moins vous aide à digérer…). Et pour ceux qui me demandaient pourquoi Jackie Berroyer nous faisait un petit sourire avec un regard malicieux quand nous lui disions « Bonjour monsieur Bartel ! » à chacune de ses venues au festival, la réponse est dans ce film.
Master Class avec Fabrice du Welz, vendredi à 14h30 à l’ENSAV
Je redis qu’il est passionnant à écouter et se prête tout à fait au jeu des questions/réponses.
Entrée gratuite, et la salle Art et Spectacle est top !
CARTE BLANCHE FABRICE DU WELZ à la Cinémathèque de Toulouse, vendredi à partir de 19h :
DEUX FILMS EN 35 MM : POUR TOI, J’AI TUÉ (Criss Cross) de Robert Siodmak et DÉSIR MEURTRIER, de Shôhei Imamura, qu’il présente ainsi dans le programme, avant de les présenter en vrai
- POUR TOI, J’AI TUÉ (Criss Cross), de Robert Siodmak (1948)
« Sommet du film noir américain, Criss Cross est un chassé croisé démentiel d’intrigues, de flash-back et de manipulations. L’histoire d’une âme damnée (Burt Lancaster), ravagée par un amour obsessionnel et inexorable pour une femme (Yvonne De Carlo) trouble et troublante… sous le regard génial de Robert Siodmak qui réussit ici un film cauchemar, sublime, réel et abstrait à la fois. »
- DÉSIR MEURTRIER, de Shôhei Imamura (1964)
« Adapté d’une nouvelle de Shinji Fujiwara, le cinéma de Imamura a toujours questionné le désir féminin. Dans Désir Meurtrier, cette recherche va plus loin puisqu’il nous donne à voir l’évolution sociale et psychologique d’une femme mal aimée et victime de viols … Un film sublime entre le documentaire et la fantasmagorie. Froid et clinique et pourtant traversé d’une poésie folle et sordide. Une merveille. »
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SÉBASTIEN MARNIER
POLISSONS ET GALIPETTES de Michel Reilhac (2002) – mardi 17 à 16h à l’ENSAV
Durant ses études en arts appliqués et en cinéma (et bien avant ses deux long-métrages), il s’intéresse notamment aux films porno du début du XXe siècle, ce qui donnera à Michel Reilhac l’idée du projet Polissons et galipettes qui compile 12 films porno réalisés clandestinement entre 1905 et 1930 à destination de la clientèle des bordels hauts de gamme.
IRRÉPROCHABLE et L’HEURE DE LA SORTIE – mardi 17 à l’ABC à partir de 19h45
Qui sont les monstres dans notre société ? Sébastien Marnier propose deux films des plus troublants : IRRÉPROCHABLE en 2016 et L’HEURE DE LA SORTIE cette année. Vous aimiez Marina Foïs et Laurent Lafitte tellement drôles dans Papa ou moi ? Venez les (re)voir dans un registre à l’opposé, mais tout aussi convaincants.
TABLE RONDE « CINEMA ET MUSIQUE » mercredi 14h, à l’ENSAV
En compagnie de Sébastien Marnier, Zombie Zombie (Etienne Jaumet, Cosmic Neman, Doc Schönberg aka Jérôme Lorichon) et Nils Bouaziz (Potemkine Films).
CARTE BLANCHE A SEBASTIEN MARNIER : LES NOCES ROUGES de Claude Chabrol (1973) – mercredi au Cinéma ABC à 16h30
Il présente son choix ainsi : « Dans Les Noces Rouges, Chabrol met en scène une passion destructrice où Piéplu, Piccoli et l’impériale Stéphane Audran forment un trio au bord du précipice ; l’un des chefs-d’œuvre méconnus du cinéaste, où la tragédie se dessine dans chaque recoin de plan et se distille comme un poison dans les veines de chacun. Fascination absolue pour la séquence du lac ».
CARTE BLANCHE A ZOMBIE ZOMBIE : LA COURSE À LA MORT DE L’AN 2000 de Paul Bartel (quand je vous dis que tout se tient, ah ah) (1975) – mercredi au Cinéma ABC à 18h30
Etienne Jaumet de Zombie Zombie : « On rigole bien pendant cette course à la mort, pourtant sous ses airs de série B, ce film dénonce la toute puissante société du spectacle. La télé-réalité est devenue une sorte d’exutoire social pour contrôler les masses. À la manière des jeux romains antiques, une course de voiture annuelle est organisée où les concurrents sont encouragés à écraser impunément le maximum de personnes en chemin. On y retrouve les acteurs David Carradine et Sylvester Stalone jeune dans des rôles complètement dingues au service d’un film aussi farfelu que visionnaire. »
DJ set Musiques de films avec Zombie Zombie – à partir de 21h au Dada
Ces deux jours en compagnie de Sébastien Marnier et Zombie Zombie se concluront par un mix DJ orienté musiques de films.
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BENOIT FORGEARD
Réalisateur que le festival aime et a reçu dès sa première édition, Benoît Forgeard vient présenter son fim YVES, qui a clôturé la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes cette année, mardi 17 à 21h à l’Utopia Borderouge et mercredi 18 à 18h40 au Cinéma Le Cratère
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JOHANNES NYHOLM
Je ne connais pas son travail, mea culpa, mais la bande-annonce de son prochain film attise la curiosité ! Voici les mots des programmateurs « Après trois courts métrages très remarqués au festival de Cannes, Johannes Nyholm s’affirme, avec ses deux premiers longs, THE GIANT et KOKO-DI KOKO-DA, comme une des voix émergentes les plus originales de Scandinavie. Son univers délirant, sorte de contes pour adultes conjuguant humour, drame et surréalisme, a forcément interpellé l’équipe du Fifigrot qui est très fière de recevoir ce (futur) grand du septième art. Bienvenue ! »
Les deux films sont projetés en VOSTFR et pas en yougueufrüt sans sous-titres (l’humour grolandais a ses limites), en présence du réalisateur, au Cinéma ABC (p35 du programme).
Un avant-goût avec les bandes-annonces internationales :
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MIDNIGHT MOVIES
Nouveauté ! Le Fifigrot renoue avec cette vieille tradition des Midnight movies, avec deux films projetés en avant-première pour cette édition : KNIVES & SKIN de Jennifer Reeder (sortie le 20 novembre) et THE LIGHTHOUSE
de Robert Eggers (le réalisateur du si beau et angoissant THE VVITCH), présenté à la Quinzaine des Réalisateurs cette année (sortie le 18 décembre)
KNIVES & SKIN – lundi 21h et vendredi 21h45 au Gaumont Wilson
THE LIGHTHOUSE -vendredi 23h59 et samedi 22h, à l’American Cosmograph
Toutes les informations sur ses séances et sur la totalité de la programmation si dense sur le site du festival http://www.fifigrot.com
BANZAI !