Saphia Azzedine publie Confidences à Allah chez Stock. Un roman brillant qui ne laisse pas insensible dès les premières pages.
Saphia Azzedine faisait une entrée remarquée dans la littérature avec Confidences à Allah publié une première fois en 2008. 10 ans plus, et comme l’explique l’auteur dans la préface, elle se replonge dans ce roman et décide de le réécrire afin de lui donner encore plus de profondeur. D’ajouter ou de développer des rencontres, des luttes et faire entendre encore plus fort le cri de Jbara
Jbara est une jeune bergère qui vit dans un village pauvre. Sa vie est rude. De longues journées à ne rien faire, à garder les brebis, à prier aussi. Elle ne sait ni lire, ni écrire. Le quotidien est vide, fade. Heureusement, il y a les Raïbi Jamila, ces fameux yaourts à la grenadine que Jbara adore. Mais pour avoir ce trésor, une unique condition, Jbara laisse un homme plus âgé lui faire des choses. Elle sait que c’est mal, Haram, diraient ses parents. Ils disent même pire que cela lorsqu’ils découvrent que Jbara est enceinte. Une honte, une malédiction. Jbara se retrouve à la rue, seule, enceinte et ignorant tout du monde.
Dieu, m’entends-tu ?
Jbara, dans un long monologue, s’adresse à Dieu, demande des explications, de l’aide. Elle y croit. Allah saura la guider. La preuve : n’a-t-il pas fait tomber une valise d’un bus local sous les yeux de Jbara ? Une valise Dior remplie de rêves et de promesses ? Jbara traverse des paysages, des villes, tirant devant elle la valise. Une touriste, penseront les autres. Mais personne n’est dupe et Jbara devra accepter bien des sacrifices pour pouvoir survivre. D’humiliations en déchéances, Jbara finira par en vouloir terriblement à Allah de l’avoir abandonnée.
Ne jamais renoncer
Il serait absurde de ne voir en Jbara qu’une pauvre paysanne ou une prostituée qui ne se respecte pas, Jbara est un personnage bien plus solaire. Drôle même. Une jeune femme qui se bat, qui ne veut pas croire que la vie sera toujours sombre. Injuste. Elle en est sûre, un jour son tour viendra. Un jour elle connaîtra la paix. Son combat est bouleversant. Elle rappelle le sort de milliers de femmes dans le monde qui rêvent de liberté, d’amour. Jbara est une battante et une héroïne qui saisit par sa vérité.
Le texte de Saphia Azzedine est une vraie bombe. De poésie et de vérité. Le ton est cash, brutal, violent, à l’image du destin de son personnage principal. Quelle bonne idée d’avoir republier ce texte qui, 10 ans plus tard, a encore tant à nous dire !
Saphia Azzedine, Confidences à Allah, Stock, 201 p.
Photo : Saphia Azzedine ©Philippe Matsas