Kursk, un film de Thomas Vinterberg
La tragédie du Kursk, à l’aube du troisième millénaire, a stupéfait la planète entière. La voici à l’écran. Dans toute son horreur et sa mortelle stupidité.
C’est le 12 août 2000 que le monde entier apprend l’accident qui a entraîné par le fond le sous-marin russe Kursk en Mer de Barents, lors d’un exercice naval. Cet accident n’est que la conséquence inévitable de matériels obsolètes, y compris les missiles embarqués à bord. Sur les 118 membres d’équipage, 23 ont réussi à se réfugier dans un compartiment étanche et à survivre quelques jours. Hélas, le matériel de secours de la Russie n’est pas plus brillant que le reste de son arsenal militaire et, malgré plusieurs tentatives, les malheureux périrent asphyxiés et noyés. Tragédie inévitable ? Pas si sûr car, et le film est parfaitement documenté sur le sujet, les militaires occidentaux ont rapidement proposé leur aide avec du matériel autrement sophistiqué et capable d’extraire à temps les malheureux de ce qui allait devenir leur linceul marin. Mortelle scorie d’un ego démesuré dictée par Vladimir Poutine, étrangement absent de ce film (?), la Russie refuse cette aide et ne l’acceptera que pour aller récupérer…les cadavres ! 71 orphelins vont porter le deuil de pères sacrifiés sur l’autel d’une stupidité incommensurable.
Ce film se lit sur trois niveaux. Nous allons suivre les sous-mariniers, sous le commandement de Mikhaïl (Matthias Schoenaerts, toujours aussi précis et convaincant), dans leur préparation puis, et cette partie est fatalement romancée, dans leur lutte pour une survie forcément aléatoire. Point ici d’effets de style genre blockbuster, mais la froideur d’un lieu clos, métallique, dans lequel l’oxygène se raréfie. Claustrophobes s’abstenir ! Sur terre, c’est un autre combat qui est engagé. Le combat politique d’abord entre les amirautés occidentales et russes, un combat entre l’évidence et la raison face à un orgueil aussi démesuré qu’inhumain. L’autre combat est celui des épouses, mené par Tanya (Léa Seydoux), la femme de Matthias. Elles doivent se battre contre un discours aussi lénifiant qu’ahurissant vu les circonstances. En creux, ce film souligne, s’il en était besoin, la rigidité autant mortifère que dogmatique d’un pays qui n’a peut-être pas encore atteint les limites de son enfer. Produit par Luc Besson, ce film est en vo anglaise, ce qui ne manque pas de troubler un brin la véracité du message. Dommage. A voir tout de même pour évaluer, si cela n’est déjà fait, l’abîme ouvert aux portes de l’Europe.
Kursk – Réalisateur : Thomas Vinterberg – Avec : Matthias Schoenaerts, Léa Seydoux, Colin Firth…
Thomas Vinterberg – Avec des hauts et des bas
Ce plus jeune élève de l’Ecole nationale du Danemark voit son court-métrage de fin d’études nommé à l’Oscar de 1994. Il a 25 ans ! Au côté de Lars von Trier, il écrit la charte du fameux Dogme 95 en réaction au formatage hollywoodien. A la clé le célèbre Festen (1998), Prix spécial du Jury à Cannes. Les longs métrages vont se succéder, 11 à ce jour y compris le film sous rubrique, avec, il faut bien le dire, plus ou moins de bonheur.