La saison toulousaine des Grands Interprètes débute à la Halle aux Grains avec l’opéra « Serse », de Haendel, interprété en version de concert par l’ensemble Il Pomo d’Oro dirigé par Maxim Emelyanychev, avec le contre-ténor Franco Fagioli, la mezzo-soprano Vivica Genaux, les sopranos Inga Kalna et Francesca Aspromonte…
Comme Johann Sebastian Bach, Georg Friedrich Haendel est né en Allemagne en 1685. Formé à l’opéra italien alors en vogue en Europe, il s’installe en 1710 à Londres, où la vie musicale a sombré dans une certaine monotonie depuis la mort de Henry Purcell, quinze ans plus tôt. Il y trouve aussitôt le succès avec « Rinaldo », premier opera seria composé pour cette ville. Naturalisé anglais, il y livrera de multiples ouvrages lyriques, oratorios, cantates, etc. Il devient alors le chef d’orchestre de la Royal Academy of Music, compagnie lyrique financée par plusieurs dizaines d’aristocrates mécènes qui rayonna dans la capitale de 1720 à 1728. Le succès fut tel qu’on y produira 34 ouvrages, dont quatorze de Haendel, avec 460 représentations au total.
Créé en 1738, au King’s Theatre de Haymarket, « Serse » est l’un des derniers opéras du compositeur. Pressentant que le genre qui avait fait sa gloire perdait peu à peu les faveurs du public, il allait dès lors se diriger vers la forme oratorio, en langue anglaise, dont on trouve les prémices dans « Serse ». Il s’agit d’ailleurs de son dernier grand chef-d’œuvre d’opéra italien. L’œuvre ne connut que cinq représentations avant de disparaître pendant presque deux siècles. On y entend notamment le très célèbre largo «Ombra mai fu» hérité du « Serse » que Giovanni Battista Bononcini avait composé en 1694, à Rome. Haendel fit remanier un livret écrit initialement pour Francesco Cavalli, en 1655, mais lui conserva l’esprit si caractéristique de l’opéra vénitien, où s’opère le mélange des genres entre scènes comiques et tragiques. Cette spécificité en fait une œuvre novatrice dans le parcours du compositeur qui souhaite en cela s’adapter au goût de l’époque.
L’ouvrage narre les amours imprévisibles de Serse, roi de Perse et personnage indécis, fil conducteur d’une intrigue fort complexe et à rebondissements politiques et drolatiques – travestissement compris. En résumé, le roi délaisse la princesse Amastre après être tombé amoureux de Romilda, laquelle file le parfait amour avec Arsamene, frère du roi. Ce dernier chasse alors son frère encombrant de sa cour, alors que Atalanta, la sœur de Romilda, est elle aussi éprise du frère banni.
La partition recèle nombre des plus beaux airs de Haendel, dans une grande variété d’affects, servant fortement le rôle-titre pour lequel il fit à nouveau appel au castrat soprano Gaetano Caffarelli. Celui-ci retrouvait à ses côtés la soprano Francesina (Elisabeth Duparc) et la basse Antonio Montagnana, un trio ayant déjà séduit à maintes reprises le public londonien. C’est avec cet ouvrage, donné en version de concert, que s’ouvre à Toulouse la saison des Grands Interprètes. Il sera dirigé à la Halle aux Grains par le jeune chef russe Maxim Emelyanychev, à la tête de l’ensemble Il Pomo d’Oro, avec le fameux contre-ténor argentin Franco Fagioli(photo) dans le rôle de Serse, la mezzo-soprano Vivica Genaux dans celui d’Arsamene, les sopranos Inga Kalna en Romilda et Francesca Aspromonte, en Atalanta, etc.
Jérôme Gac
Les Grands Interprètes
Il Pomo d’Oro • Maxim Emelyanychev (direction)
mercredi 07 novembre 2018 • Halle aux Grains (20h00)
photo: F. Fagioli © Igor Studio / DG