« Auteur compositeur, c’est mon métier finalement. » C’est par ces mots que débute l’entretien avec Richard Seff, auteur, compositeur, producteur, fondateur de Midiscom, la société leader en marketing sensoriel, qui fête ses 25 ans en cet automne 2018.
Retour sur le parcours d’un pluriactif que les rencontres de la vie ont ouvert à des approches inattendues.
Quelque chose d’artistique
À l’âge de 16 ans, Richard Seff réalise son goût pour l’art : il aime le cinéma, la photo, le théâtre, la musique. Il se rêve plutôt réalisateur, mais joue de la batterie, de la guitare, en duo avec son frère Daniel. Il réalise très vite son goût pour l’écriture, alors qu’une idée de texte lui vient un jour sur une musique de Daniel.
Tout à leurs créations « pour le plaisir », les frères Seff écrivent suffisamment de titres pour un album. Un formidable coup de pouce leur est alors donné par un ami de la famille qui les met en relation avec Claude Nougaro. Et Nougaro de les présenter à son directeur artistique…
Ils signent leur premier contrat avec le label Festival. C’est là qu’ils rencontrent Gérard Lenorman en recherche de titres. Le chanteur choisit un de leurs morceaux, De toi, pour son single qui deviendra rapidement un succès. Suivront Le Petit Prince, Les Matins d’hiver, Les Jours heureux… Les chansons de Gérard Lenorman séduisent d’autres artistes, parmi lesquels Mike Brant qui demande à Richard de lui écrire un texte sur l’une de ses musiques. Ce sera C’est ma prière. À cette époque, Richard Seff a 19 ans et compte deux chansons classées N° 1 et 2 dans les hit-parades.
De l’écriture de chansons à succès à la production musicale
Pour autant, Richard Seff se sent souvent frustré de ne pas entendre ses chansons comme il les avait imaginées, après leur passage entre les mains des directeurs artistiques, des arrangeurs et des studios parisiens.
À Toulouse, le studio Condorcet — ouvert en 1971 — est le premier studio professionnel indépendant de province. Ici, le travail est moins contraint qu’à Paris, les artistes disposent du temps dont ils ont besoin. Richard Seff y réalise son premier album et découvre le plaisir de la production musicale.
En 1974, il rencontre Francis Cabrel lors d’un radio-crochet organisé par Sud Radio. Cabrel chante Petite Marie et gagne le concours. Pour Richard Seff, le talent de ce jeune artiste est évident. Il l’invite chez lui pour écouter ses chansons – il n’en a encore composé que trois — et réalise ses premières maquettes avec lesquelles il embarque l’équipe du studio Condorcet dans le projet. L’enregistrement des titres se fait au fur et à mesure que Francis Cabrel compose et arrive à se libérer de son travail de magasinier à Agen. Lorsque son premier album, Les Murs de poussières, est terminé, CBS le signe et Richard Seff devient producteur.
Désormais et durant les années 80 et 90, Richard Seff est producteur de ses chansons : Les Démons de minuit pour Image, Macumba et Disparu pour Jean-Pierre Mader, Je t’attends pour Axelle Red, entre autres.
Midiscom et la production d’univers promotionnels
Production oblige, Richard Seff monte son propre studio d’enregistrement près de chez lui, en 1989.
C’est à cette époque qu’une agence de communication en quête d’une chanson déclinable en publicité télé et radio le contacte. Il se laisse tenter par l’aventure et fabrique un contenu adapté pour les Manèges à bijoux des centres E. Leclerc.
Des responsables du groupement venus écouter la campagne dans son studio d’enregistrement le sollicitent pour travailler sur l’ambiance sonore de leurs magasins. Richard Seff va plus loin en intégrant le son pour communiquer auprès des clients. Mais comment faire passer un message publicitaire adapté à des magasins qui ne suivent pas tous, ni en même temps, les mêmes campagnes ? Les supports de l’époque, CD ou diffusion par satellite, ne le permettent pas. Richard Seff réunit alors des compétences et développe, pendant près d’un an, un système fondé sur l’informatique musicale qui vient de faire son apparition dans les studios professionnels. Le résultat est une véritable radio E. Leclerc qui peut adapter sa musique et ses messages à chaque magasin de l’enseigne. Dès lors, Midiscom s’impose par son avance technologique et devient rapidement un des leaders de ce marché.
Richard Seff, chef d’entreprise, met son savoir-faire au service des plus grandes marques pour réaliser leur identité sonore. Il développe un système similaire pour la vidéo en créant des TV d’enseigne, notamment pour Cultura.
Ambiance sensorielle et stratégie opérationnelle
Au début des années 2000, l’olfactif se développe. Pour Richard Seff, il y a là quelque chose d’assez stimulant : la création d’un univers complet, de la musique à l’olfactif. Dans un salon professionnel, il fait la connaissance de Martine Asprogitis qui travaille les senteurs en lien avec les parfumeurs. Elle vit à Toulouse et a développé une clientèle dans le secteur médical. Ainsi débute une nouvelle association !
Midiscom se dote d’un laboratoire et travaille avec des parfumeurs de Grasse pour ses commandes de senteurs définies avec les clients. Une nouvelle branche se déploie dans la société, l’olfactif, faisant de Midiscom la première société spécialisée dans le marketing sensoriel en France. Elle compte, parmi ses clients : Audi, Aubade, Claire’s, Cultura, Dessange, E. Leclerc, La Juventus de Turin, Korian, Karl Marc John, Mini-BMW, Ligne Roset, Pharmavie, Roche et Bobois, Tisséo…
Intégrer le marketing sensoriel dans le marketing global de la marque ne coule pas de source. La part stratégique est importante : transformer un brief marketing en musique, texte, image et senteur est un défi qui se renouvelle à chaque nouvelle demande. La musique et l’ambiance olfactive doivent être en cohérence avec le lieu, la clientèle et le type de produits qui s’y trouvent, au risque de produire un message brouillé, voire négatif. « Qui n’a pas été gêné ou dérouté par une musique inadaptée ou une senteur dérangeante ? » commente Richard Seff, avant d’ajouter : « La maîtrise du projet, de la conception à la diffusion, est donc indispensable pour donner une première impression positive. »
La concurrence accrue de la vente en ligne a poussé les enseignes à changer leur approche dans les magasins. Aujourd’hui, le client doit vivre une expérience singulière. Faire appel à ses sens, à ses émotions, à travers le marketing sensoriel, en fait partie. Cette dynamique du secteur oblige Richard Seff à s’adapter aux nouvelles technologies, à intégrer de plus en plus l’interactivité, à rester en alerte et, sans cesse, à questionner ses pratiques pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs.
Créer et s’engager pour ses pairs
Mais Richard Seff est aussi impliqué dans le versant institutionnel de la musique : membre du conseil d’administration de la Sacem — Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique — il en sera vice-président en 2014 et 2015. Pour lui qui a vécu de droits d’auteur dans son activité musicale, il importe de passer du temps et de l’énergie à défendre les auteurs aujourd’hui menacés par les nouvelles pratiques sur le Net qui ne rémunèrent plus les artistes en général et les créateurs en particulier. Il est également président du FCM — Fonds pour la création musicale —, vice-président de l’UNAC — Union nationale des auteurs et compositeurs — et du Centre des écritures de la chanson Voix du Sud, fondé par Francis Cabrel.
Au printemps 2018, Richard Seff est parrain de la douzième édition du Prix d’écriture Claude-Nougaro porté par la région Occitanie. C’est, pour lui, une belle occasion de rendre hommage au maître incontesté de l’écriture qui lui a porté chance dans le métier. Il se reconnaît dans ce prix qui met l’accent sur l’écriture, bien sûr, mais qui comprend une catégorie pour les très jeunes, des jeunes qui ont le même âge que celui de ses débuts dans la musique — catégorie Découverte pour les 15-18 ans, Tremplin pour les 18-25 ans.
Car Richard Seff est aussi écrivain. Les débuts de la télé-réalité, avec ses stars fabriquées de tout piece, et l’envie d’une expression longue — plus longue que celle permise par la chanson — lui inspirent son premier roman. La Décadanse est publié en 2004 par Frédéric Beigbeder aux éditions Flammarion. Deux autres romans suivront : Une idée du bonheur et Les Étoiles meurent aussi.
D’un anniversaire à l’autre
En 2015, Richard Seff fête son anniversaire au Stade de France, entouré d’amis, pour le concert Stars 80. Ses chansons sont reprises en chœur par les jeunes générations. C’est un moment magique, improbable. Le temps d’un morceau, le public est uni, les gens sont heureux. Son travail finalement, c’est une sorte de contribution au bonheur de chacun !
En 2018, l’heure est encore à la fête pour les 25 ans de la société Midiscom. Un anniversaire qu’il va souhaiter fin septembre avec ses 25 collaborateurs et quelques-uns de ses 3 000 clients.
Richard Seff dit qu’il n’a pas vu le temps passer. Pour lui, il n’y a pas beaucoup de différence entre produire un disque, créer une entreprise et développer de nouveaux projets. Cela passe par une vision, puis la mobilisation des bonnes personnes tout au long de la production, en un travail d’équipe efficace.
Et tout continue ! La production musicale se poursuit avec 2 artistes en développement , tous deux Toulousains, encore… : Ben Michel, qui tourne depuis plusieurs années sous le nom de Yellow, et ITS, une sœur et un frère âgés de 18 et 20 ans.. Alors qu’ils étaient des adolescents déjà très prometteurs, Richard Seff les a découverts grâce à son fils Frédéric, éditeur de musique.
Dans une cohérence totale, Richard Seff reconnaît avoir la chance inouïe de vivre ce qu’il avait envie de vivre, au-delà même de ce qu’il envisageait dans ses jeunes années, et de se sentir utile tout en prenant beaucoup de plaisir, mais ça, c’est son esprit zen, qui lui a inspiré son dernier livre (Esprit Zen aux éditions Ipanema).
« La créativité n’est rien sans la capacité à rendre vraies ses idées. »
Hélène Duffau
📍 Richard Seff • Les acteurs de la Culture
Midiscom
1 chemin du Canal • 31320 Péchabou
Tel : 05 62 71 83 11
Richard Seff @ Pierre Beteille