Dans sa temporalité biennale, c’est la deuxième édition que le Printemps de septembre va ouvrir le 21 septembre pour un mois, festival fondé en terres lotoises et qui perdure à Toulouse grâce à la ténacité indéfectible de sa présidente Marie-Thérèse Perrin. C’est toujours Christian Bernard, présent à la première, qui mène cette vaste entreprise, assisté de ses douze commissaires. Autant dire que la ville va vibrer pendant un mois, autant sur le plan visuel que sonore. Expositions, concerts, projections, installations et performances vont prendre possession de nombre de lieux.
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Cassandro, the exotico ! © Simon Fravega
Car tel est son titre générique, Fracas et Frêles Bruits ne peuvent que faire penser à un certain “de bruit et de fureur“ shakespearien, et c’est bien le reflet du monde actuel que le Festival ne peut ignorer et se doit de se placer au cœur des conflits et des tensions et des bouleversements du monde actuel, dans ces fracas aussi bien de la nature humaine que de la nature qui l’entoure.
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© Virginie Loze, sans titre, 2017, 180 x 180 cm, technique mixte
Fracas et Frêles Bruits se doit de faire entendre et voir la coexistence des formes et des pratiques les plus diverses dans l’art d’aujourd’hui comme autant de tentatives de dire et de penser le monde et ce que l’art peut y ajouter sans l’encombrer ni le perdre.
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Anne Deguelle, Les Mariées de Fécamp, 2002 © Anne Deguelle
Toulouse reste le point géométrique mais des prolongements conduisent cette édition jusqu’à Colomiers, Pavillon Blanc Médiathèque/ Centre d’art, le Quai des arts de Cugnaux et la Maison Salvan de Labège, et même plus loin encore avec le Musée Calbet de Grisolles et la Chapelle Saint-Jacques, centre d’art de Saint-Gaudens, ce qui permet au Printemps de Septembre de présenter plus de vingt-cinq expositions d’œuvres créées pour la circonstance ou inédites en France, ainsi que des concerts et des performances.
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© Lisa Reihana, in Pursuit of Venus [infected]
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© Tracey Moffatt, Vigil, 2017,image fixe
Les conséquences de l’installation agressive de toutes ses colonies de par le monde sont traitées par Tracey Mofatt au Théâtre Garonne et, plus lointainement, par Laurent Mareschal à l’Hôtel-Dieu. À Garonne, l’installation vidéo s’appelle Vigil, avec des photos d’embarcations bondées qui alternent de plus en plus rapidement avec des cutt off de films hollywoodiens – séquences isolant les portraits d’Elisabeth Taylor ou Donald Sutherland. Derrière leur fenêtre, ils semblent tendus vers les bateaux qu’ils observent à travers les stores ou une paire de jumelles. L’expression de leurs visages, à mesure que les bateaux semblent se rapprocher davantage, évolue progressivement de la consternation vers l’horreur. La bande-son oppressante participe à l’intensité dramatique des images dont le rythme s’accélère jusqu’à la frénésie et laisse présager d’une fin tragique.
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© Gerard Byrne, In Our Time, 2017, vidéo, durée indéfinie
Les formes de l’image en mouvement « après cinéma » seront notamment illustrées par l’installation de Gérard Byrne et Steven Anderson à la Fondation Espace Ecureuil tandis que le premier cité est aussi présent au Théâtre Garonne avec une installation vidéo, In Our Time. Elle décrit les activités quotidiennes d’une station de radio commerciale archétypale, provoquant des questions sur la relation entre la radiodiffusion, le temps, la musique pop et la mémoire collective. Le cadre temporel de cette nouvelle installation reste difficile à définir, car il représente un présentateur travaillant dans un studio de radio américain en bois, jouant des chansons pop classiques, prenant des appels et s’adressant à son public absent. De durée indéterminée, In Our Time établit une relation entre l’espace caché de l’émission radiophonique représentée et les circonstances physiques du spectateur.
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Flyway © Lz Dunn
Enfin, le Théâtre Garonne se devait d’accueillir une véritable performance, Flyway, une coproduction. Elle est due à Lz Dunn, basée à Melbourne, qui interroge au sein d’un collectif d’artistes APHIDS, les relations entre l’écologie et les représentations humaines. C’est une balade audiovisuelle performative qui plonge le public dans les voyages épiques et enchanteurs des oiseaux migrateurs. Adaptée en réponse à chaque nouveau lieu, la proposition déambulatoire de l’artiste explore nos liens à l’écologie, en intégrant la recherche sur les oiseaux et le public dans le tissu urbain. Aux dernières heures du jour, une trentaine de spectateurs équipés de casques audio et de jumelles, s’embarque pour une virée urbaine, qui tient de la méditation, l’observation ornithologique, la performance, le land art, l’immersion sonore… Au fil d’un parcours qui conduira des bords de la Garonne au centre ville, chacun pourra filmer, réinventer ce qu’il voit de la ville transformée par la présence fugace des oiseaux.
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© Sarkis, Mesure de la lumière, Esquisse, 2018
L’église des Jacobins va accueillir dans sa monumentalité une création du plasticien voyageur turc Sarkis, Mesure de la lumière. L’œuvre consiste à investir avec méticulosité l’intérieur du monument. Entre les piliers de l’imposante colonnade à la verticale vertigineuse, il suspend sept tubes fluorescents en cristal déroulant les sept couleurs de l’arc-en-ciel. Alignés en face de chaque vitrail, ces traits de lumières se substituent aux rayons du soleil dénaturés par les vitraux. On vous laissera découvrir le fagot de sept autres tubes et la nature de la bande sonore qui va habiter le profond silence de la merveille de presque huit cents ans.
Dans le Cloître, une fontaine de Tatiana Trouvé réinvente l’ancien lavabo des moines dominicains.
Un autre article à venir vous fera part de quelques autres éléments parmi les plus de vingt-cinq de ce Festival.
Michel Grialou
Le Printemps de Septembre
du 21 septembre au 21 octobre 2018
Toulouse