Un long article vous a déjà éclairé sur cet artiste lors de son exposition au Musée Goya de Castres, article repris en grande partie pour présenter l’exposition actuelle à la toute nouvelle Galerie Barrès-Rivet, née il y a quelques mois à peine Place Saintes-Scarbes à Toulouse. Galerie qui a décidé de mettre en pleine lumière le travail de ce peintre, toulousain depuis son adolescence et qui, même s’il ne tire pas un trait sur les années de son enfance, revendique son attachement au sol depuis son installation dans notre bonne ville de Toulouse.
Exposition qui met en lumière jusqu’à la fin du mois d’avril encore, des travaux restés pour la plupart, non pas cachés mais en retrait, leur créateur étant bousculé par tant d’envies de peindre d’une autre manière, d’autres sujets, sur d’autres supports, et le temps s’écoule, si vite et irrémédiablement. La galerie, par contre, a décidé de montrer de façon régulière les différentes périodes, si l’on peut le dire ainsi, du travail du peintre. Une façon de rattraper ce qui n’a pas été fait sur le territoire de sa ville d’adoption.
Nombreuses sont les notes d’atelier qui peuvent être répertoriées, et pour la plupart, tellement évidentes par leur formulation même condensée en quelques mots. « J’ai toujours rêvé de réaliser un tableau dont le contenu aurait le pouvoir de déclencher le rire ou les larmes. Je pense qu’il manquera toujours à la peinture l’usage de la parole. » mais si vous connaissez un peu de la vie du peintre jalonnée de drames et petites joies et grandes peines, vous serez frappé par la force avec laquelle cela peut être traduit sur le support, avec cette rage dans le trait, la violence dans les couleurs, l’envie irrépressible de montrer et montrer encore, la répétition de petits motifs qui envahissent et peuvent ne laisser aucun répit à la toile et à l’œil.
Pas besoin de longues phrases et paraphrases avec Joan Jordà. Ainsi nous assène-t-il en quelques mots le résumé de tant et tant de travaux réalisés depuis qu’il a ressenti l’impérieux besoin de s’exprimer sur des supports divers : « Je dois reconnaître une probité à la peinture, elle résiste impitoyablement à ceux qui n’en sont pas dignes. » Inutile ici de vous asséner des points de repères de tel ou tel expressionniste, si dans ses œuvres on retrouve des éléments rencontrés dans les sources espagnoles et catalanes avec des noms qui vous assaillent comme Picasso, Goya, Tapiès, Saura, Clavé, Clemente, Muxart et plus loin des Appel, Jorn, Dubuffet, Bacon, Riopelle. Si l’immersion paraît totale, il se trouve que, tout de même, comme on reconnaît à chacun sa “patte“ c’est pareil pour Joan Jordà. Autre point vérifiable, qu’il énonce : « Dans mes toiles, je ne saurais me passer d’une présence humaine pour le dialogue ou l’interrogation. »
Et c’est pourquoi, avec Alain Mousseigne, nous pouvons partager sans contrainte aucune les quelques mots suivants : « Isolés, totémiques, éclatés, déchirés, disloqués, mutilés, réduits à des signes-formes confondus aussi en de grands effets de foule, les figures et les motifs de Jordà s’orientent entre ordre et chaos, oscillent entre primitivisme et expressionnisme dramatique pour raconter « l’histoire délirante de l’homme : sa folie. »
« Aujourd’hui, malgré un ciel très pur,
je continue mes barbouillages malgré ou à cause de cette histoire de fou. » et encore,
« La peinture n’existe que par le regard des autres.
Chanceux celui qui rencontre une “complicité du regard“
Pour le soutenir dans sa longue quête
Et peut-être l’engager sur de meilleurs chemins. »
Galerie Barrès Rivet
1 place Sainte Scarbes • 31000 Toulouse
Joan Jordà • Peintures 1978 – 1982
Exposition du 09 mars 2018 au 28 avril 2018