On est bien au XVIIIè siècle. Drame et prière se mêlent harmonieusement. Un grand “drame sacré“, plein d’espoir, de vivacité et de lumière qui vous interpelle à chaque numéro. On adhère avec grande humilité à cette interprétation “baroque“. Ici, tout fonctionne, à commencer par le montage du concert avec les premières œuvres interprétées qui amènent tout naturellement et fort judicieusement le Requiem après un dernier Miserere de Mozart. C’est astucieux, et efficace car les esprits sont ainsi préparés pour l’ascension !
On ne détaillera pas, pour éviter les répétitions de compliments bien mérités mais, la direction d’orchestre de Raphaël Pichon, fut légère et pourtant pleine de sens, fort contrastée et pourtant jamais ostentatoire. Pas de sentimentalisme, ce qui ne nuit pas à l’émotion grande et sincère. Une vision à l’équilibre parfait. Alors, tout va aller au mieux dans ce Requiem qui s’adresse à Dieu avec infiniment de respect, de sérénité et d’humilité, sans mièvrerie, ni arrogance.
Les quatre solistes sont superbes et bien sûr parfaitement choisis. Sabine Devieilhe, Sarah Mingardo, John Irvin et Nahuel di Pierro, de belles voix mozartiennes, bien différenciées, légères ce qu’il faut dans le timbre et la diction, mais aussi profondes et engagées si nécessaire. On se permet d’ajouter cependant que la soprano a une voix d’une grande pureté et le ténor un timbre jeune et expressif.
Le chœur de l’Ensemble Pygmalion, si homogène, à la couleur superbe, et très inspiré, dialoguant toujours avec une grande musicalité, impétueux quand il le faut, ne se privant pas dans les effets spectaculaires. Ferveur assurée dans le Rex Tremendae et le Sanctus, limpidité dans le Confutatis, un Lacrimosa appelant la justice divine….L’Orchestre, conséquent, est d’un engagement total, suivant les moindres volontés de son chef, et les coups de boutoirs aux cordes et aux vents sont bien présents sans agressivité aucune. Mais on finirait par détailler chaque numéro, ce qui n’est pas le but de ce petit compte-rendu, simplement là pour se faire plaisir, après une soirée au sommet, nimbée de lumière éternelle.
Au bilan, une interprétation sur instruments anciens passionnante, lumineuse et percutante ce qu’il faut, qui a fait l’unanimité. Du coup, les versions dites traditionnelles (grand orchestre, chœur très fourni, instruments modernes) paraîtront bien lourdes, trop solennelles, pathétiques à l’excès, empesées. Le verdict peut être impitoyable.
Michel Grialou
Pour aller plus loin : Le divin Mozart, une totalité qui nous enclot et qui nous aime
Pygmalion
Raphaël Pichon (direction)
Sabine Devieilhe (soprano)
Sara Mingardo (mezzo-soprano)
John Irvin (ténor)
Nahuel Di Pierro (basse)
Halle aux Grains
mercredi 14 mars 2018 à 20h00
Raphaël Pichon © François Sechet / Harmonia Mundi