Eva, un film de Benoît Jacquot
Cette seconde adaptation au cinéma du roman paru dans la collection Série Noire en 1946 et signé James Hadley Chase n’est pas vraiment convaincante et nous laisse sur notre faim.
Sa première apparition à l’écran en 1962 devant la caméra de Joseph Losey avec Jeanne Moreau et Stanley Baker nous avait autrement bouleversés. Est-ce l’interprétation glaciale, voire fantomatique d’Isabelle Huppert, Eva totalement désincarnée, glaciale pour ne pas dire glacée, monocorde à force d’être monotone, répétant à l’envie un jeu que nous lui connaissons à présent depuis trop longtemps pour qu’il soit porteur de la moindre émotion ? Assurément, cette actrice porte une grande part de responsabilité dans le néant de son personnage. Un rien plus probant, Gaspard Ulliel se débrouille comme il peut face à elle dans ce jeu de la séduction. Il lui faut du talent pour la scène liminaire de ce film, un moment particulièrement fort et malsain à la fois. Bertrand, c’est son prénom, s’occupe d’un homme âgé, malade, écrivain de son état.
Et l’on comprend, lorsque ce dernier lui demande de le rejoindre dans sa baignoire que Bertrand est un gigolo. Doublé d’un voleur et d’un assassin. Sur un scénario qui n’est pas loin, pour le moins, de rappeler le film de Yann Gozlan (L’homme idéal/2015), Benoît Jacquot tente, en vain, de donner au personnage d’Eva une dimension christique, dans son sens sacrificiel, sur le thème de l’amour et de la fidélité. Peine perdue ! Et pourtant en creux résonnent aussi des sujets tels que la manipulation et l’usurpation d’identité. Tout était réuni.
Robert Pénavayre