La romancière Faïza Guène revient avec un cinquième roman, Millenium Blues (Edition Fayard) qui dresse le portrait de toute une génération.
Faïza Guène a une voix, ou plutôt un style, reconnaissable entre tous. Elle fait partie des plumes françaises qui enchantent. Remarquée très jeune, à l’âge de 19 ans, pour son premier roman Kiffe, kiffe, demain, publiée en 2010, l’auteur impose une vision du monde contemporain qui est très juste. Dans son dernier roman, Millenium Blues, c’est un portrait des générations 90 qu’elle dresse.
La vie est faite d’une multitude de récits
L’incipit est brutal avec une scène ordinaire où des amies se chamaillent dans un embouteillage, et qui se termine par un accident et la mort d’une jeune femme. Cette première scène permet de mettre en parallèle le désir de vie, de réussite et la culpabilité qui paralyse toute possibilité de bonheur. Tel est le dilemme que doivent surmonter Zouzou, la narratrice, et sa meilleure amie Carmen. Mais qu’on ne s’y trompe pas, le roman n’est pas sombre, déprimant et encore moins rabat-joie. Faïza Guène l’a déjà démontré dans ses précédents livres, on peut rire de tout et surtout du quotidien. Le récit est ainsi ponctué de scènes qui font sourire ou carrément rire de bon cœur. Car l’auteur sait retranscrire des dialogues qui sonnent vrais, des réparties qui font mouche et des métaphores astucieuses. Les situations ordinaires parlent à tout un chacun.
Porte-parole d’une génération ?
Même si Faïza Guène ne veut pas se définir comme une porte-parole des années 90, Millenium Blues ressemble à un beau portrait de cette époque. L’auteur dit toute son affection pour cette période, tout en la moquant. Par succession de chapitres courts, Zouzou revit les évènements majeurs d’une génération, les évènements politiques, les triomphes sportifs avec la coupe du monde de 1998, les catastrophes mondiales comme le 11 septembre, etc. Tout cela auréolé d’une bande son très Dance avec le groupe ABBA qui revient en boucle. L’auteur évoque l’insouciance d’une jeunesse, la rébellion d’une adolescence, et les turpitudes de l’âge adulte. Elle y raconte les joies, les peurs et aussi l’amour ou, dans le cas de Zouzou, la désillusion de l’amour. Concernant ce thème, le chapitre « Où es-tu Charles Ingalls ? » est un exemple désopilant et savoureux du style de Faïza Guène.
Millenium Blues, on l’aura compris, est une réussite en tout point. Un roman à lire pour replonger dans les souvenirs de la jeunesse, mais qui pose cependant des questions très importantes sur des sujets sérieux à savoir la transmission, la quête du bonheur, ou encore, le rôle de la famille.
Sylvie V.
Millenium Blues, Faïza Guène, Edition Fayard, 234p.