Constance Debré ne mâche pas ses mots dans Play Boy, récit d’émancipation, de sexe et de rage, publié aux Editions Stock.
Dans la famille Debré, on demande la petite-fille, Constance Debré. Petite-fille de l’illustre gaulliste Michel Debré, un des fondateurs de la Vème république. Mais aussi la nièce de Jean-Louis Debré, ex-président du Conseil constitutionnel et de Bernard Debré, l’autre oncle, député. Bref, on l’aura compris la famille déroule un liste d’hommes célèbres. Pas facile de se faire une place avec un tel nom. Mais Constance Debré n’a pas froid aux yeux, ni la langue dans sa poche. Avocate de profession, et « bourge » de statut social, c’est elle qui le dit, elle ne se contente pas de subir sa vie, elle décide d’y mettre un grand coup de pied. D’abord en planquant Laurent, le compagnon depuis 20 ans, et le père de son fils. Alors, Constance prend un appartement dans le 6ème arrondissement et décide de mener sa vie comme elle l’entend. Et cela veut dire même sexuellement. Surtout sexuellement. Car Constance le sait, ce sont les femmes qui attirent son désir et elle veut expérimenter ce désir jusqu’à la dernière miette.
Du trash, du sexe et les mots pour le dire
Dans Play Boy, Constance Debré, 45 ans, découvre les premières amours homosexuelles. Même si elle écrit, qu’à 4 ans, elle savait déjà qu’elle était homosexuelle. Puis elle a oublié. Avec Agnés, femme mariée de 50 ans, elle retrouve la mémoire. Les premiers pas sont chastes, lents, mais le désir est là et l’issue prévisible. Au lit, Constance expérimente le corps et le désir des femmes. Puis c’est dans la rue qu’elle balaie son regard, « son radar », pour assouvir son désir des sens. Enfin, ce sera au tour de la jeune Albert d’occuper son lit et ses pensées. Mais pas de sentimentalisme, pas de mièvrerie, tout est décrit d’un coup de couteau. Les corps, les mouvements, les actes y sont disséqués comme un chirurgien qui opère. Pas de grands sentiments non plus, ni de belle histoire d’amour, Constance Debré jette les mots, secs, crus parfois, comme un constat, mais l’intime reste secret. Le récit se fait langage plutôt que tissu romanesque.
La bourgeoisie en prend pour son grade
Si Constance Debré ne fait pas dans la dentelle lorsqu’elle parle de sexe, il en est de même lorsqu’elle parle de son milieu : la bourgeoisie. Et ça balance ! D’abord sur toute la lignée Debré qu’elle descend en flèche en refusant leurs codes bourgeois. Puis, ce sera au tour du père, François, grand reporter. Ce père qu’elle présente comme un junkie qui a sombré dans toutes sortes de drogues et d’alcools. Et enfin la mère, morte d’excès en tout genre. Le portrait familial est sacrément abimé, mais donne des pages d’une violence qui font aussi sourire. Pour autant, l’auteur revendique son statut de bourge, car elle le concède : tout est plus facile quand on est riche, même sans le sou. Les pages sur la bourgeoisie et l’argent sont volontairement provocatrices, cyniques, et en même temps, lucides et justes.
En effet, le regard de Constance Debré est dur, mais il révèle certaines vérités. Dans cette famille, l’auteur a tiré la carte de l’enfant rebelle qui ne veut pas se soumettre. D’ailleurs, fini robes et cheveux longs, à la poubelle la panoplie de fille. Constance se coupe les cheveux et porte le blouson de cuir noir, nouveau costume de Play Boy ?
A l’image du personnage, l’écriture est sèche, les phrases courtes. Pas de métaphores, ni de longues descriptions, les chapitres sont des instantanées de vie et d’expérience. Le roman plaira ou choquera mais il aura, au moins, sa propre personnalité.
Sylvie V.
Constance Debré, Play Bloy, Editions Stock, 160p.