Compte rendu concert. Toulouse, 38 ème festival Piano aux Jacobins. Cloître des Jacobins, le 15 septembre 2017. F. Schubert. P. Glass. Simone Dinnerstein, piano.
Simone Dinnerstein m’avait séduit dans son récital en 2012 au musée des Abattoirs à Toulouse, lors de sa précédente venue au festival Piano aux Jacobins. Ce qui m’avait touché dans le jeu lumineux de la pianiste américaine était une caractérisation à la fois exacte et très personnelle de chaque pièce. Elle nous propose un concert à nouveau marqué par l’intelligence et l’originalité. Philippe Glass et Franz Schubert en alternance tissent en réalité plus de liens musicaux qu’il n’y paraît à première idée. Si Philippe Glass, aujourd’hui 80 ans, est le chantre du minimaliste répétitif, Franz Schubert mort à 31 ans, est lui aussi minimaliste dans la simplicité de certains thèmes, mais chez lui ils sont à foison, et les retours magiques des thèmes parfois transfigurés ont à voir avec une notion de répétition.
Le piano de l’américaine Simone Dinnerstein…
Jeux de miroir, chemins d’intelligence et d’émotions
Simone Dinnerstein passe ainsi avec constance d’un compositeur à l’autre en créant une alchimie complexe faite de similitudes et d’oppositions. Ce qui est remarquable c’est la liberté du jeu, la qualité de l’écoute harmonique, et la noblesse du geste interprétatif. Les rythmes sont bien campé chez Schubert et étirés chez Glass. L’élément aquatique de la musique de Philippe Glass, par exemple sa deuxième étude, évoque une eau profonde et envoûtante un peu mortifère puis un mouvement vivifiant à sa surface après avoir résisté à la fascination du gouffre. Chez Schubert, c’est d’avantage le ruisseau, le chemin le bordant, le mouvement observé de l’extérieur qui ranime l’âme.
Le grande Sonate en si bémol majeur de Schubert, avec justement ces géniaux retours des thèmes , est le « Lied ohne Ende °», d’un « gesegneter Wanderer °°» qui observe le monde, la nature, les gens et qui laisse son âme s’en abreuver.
Les moyens pianistiques de Simone Dinnerstein sont réels et impressionnants, mais jamais elle n’en use avec ostentation. Les doigts sont sûrs, les nuances très belles et profondément creusées dans une somptueuse matière sonore. Les couleurs sont complexes surtout dans Glass, avec ses harmoniques graves dégustées en une plénitude par la pianiste dans un geste quasi incantatoire. Un très beau concert qui permet la rencontre avec l’intelligence de l’âme, l’originalité de l’interprète et la finesse de la musicienne. Merci à Simone Dinnerestein pour ce partage intime et bouleversant, qui accompagne le public vers d’avantage de compréhension du monde sonore. Le pont entre Schubert et Glass est une construction qui rend possible une autre manière d’écouter le piano en ses multitudes de possibilités, toujours dans la plus grande beauté. Le public reconnaissant, a fait un triomphe à la pianiste américaine et elle a cédé après l’immense sonate D.960 à la demande de bis, avec grâce.
°Mélodie infinie
°° Promeneur heureux
Compte rendu concert. Toulouse. 38ème festival Piano aux Jacobins. Cloître des Jacobins, le 15 septembre 2017. Frantz Schubert (1797-1828) : 4 impromptus op.90 D.899 ; Sonate en si bémol majeur D.960. Philippe Glass (né en 1937) : Metamorphosis One ; Etude n°2, 6 et16. Simone Dinnerstein, piano.