Ce jeudi 2 mars, un enchantement va se répandre dans la Salle Nougaro de Toulouse. Au fil d’une conversation rythmique et mélodique captivante, le Trio Chemirani va probablement mettre un auditoire à l’unisson d’une vibration invisible et pourtant universelle, une langue poétique et musicale, sublimée dans leur grand œuvre : l’album Dawar.
Chemirani, c’est à la fois le nom d’une famille à l’identité culturelle singulière et l’une des plus belles aventures musicales contemporaines, belle comme une rivière dont on pourrait contempler dans le même regard et la source et le delta.
Formé dans les années ’40 par les grands maîtres du tombak (1) à Téhéran, Djamchid, le père, demeure aujourd’hui encore le témoin de la tradition la plus pure. Lorsqu’il s’installe en France au début des années ’60, il prépare pour ses enfants un creuset familial riche de deux cultures, un dialogue propre à éveiller une curiosité musicale qui ne tarira jamais.
Leur sensibilité artistique se formera à l’écoute de la langue du père, le persan, et à sa tradition de musique et de poésie. Chacun tracera ensuite une route personnelle. Djamchid donnera le signal de l’exploration au-delà de la tradition en participant, en 1985, à la mise en scène contemporaine du Mahabharata de Peter Brook. De leur côté, les filles Maryam et Mardjane chantent, et les garçons Keyvan et Bijan multiplient les projets de métissages, notamment avec les musiques modales de la Méditerranée, des mondes arabes et ottomans, du jazz et du folk occidental.
Mais, régulièrement, ils se retrouvent pour fusionner leurs butinages dans une méditation commune, sorte de recherche ad libitum de l’œuvre au noir, l’alchimie d’une langue rythmique universelle.
La formule du trio est axée sur une musique de percussions, exécutée principalement au zarb (ou tombak). Claquements sous la main franche ou sons doux, chuintés, griffés sur la peau ou encore raclés sur le fût, tout est possible. Les battements sur le daf, grand tambourin, et le udu, cette jarre originaire du Niger, offrent une rupture au timbre dominant.
Souvent, les cordes prennent la main, avec le saz de Bijan et le santour de Keyvan, pour lancer d‘irrésistibles envolées oniriques. Mais ce sont les poèmes anciens scandés de la belle voix du patriarche Djamchid qui viennent à intervalles réguliers rendre le souffle pour un nouvel acte à cette belle conversation.
On verra à l’œuvre plus qu’une complicité familiale. A voir l’impulsion, l’appel et la réponse, la phrase rythmique passer de l’un à l’autre avec une telle fluidité, on se prendra n’entendre qu’une seule voix, fusionnée par l’instinct.
Car on l’a compris : s’il est bien question de frappe et de percussion, la finesse du toucher des Chemirani sur des instruments dont on ne soupçonne pas l’infinie subtilité écrira dans nos mémoires le souvenir d’une langue intime, une langue que l’on ne connaissait pas.
(1) Nom persan de ce tambour à peau tendue sur corps en bois en forme de champignon. Zarb est son nom arabe
Leurs enchaînements fusionnels transcendent les frontières et parlent à tous. […] Ce trio unique en son genre élabore une musique percussive étonnamment mélodieuse, qui ensorcelle et transporte. Télérama
Réserver pour le concert à La Salle Nougaro de Toulouse (2 mars 2017)
https://youtu.be/fBfWgiVAL64
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Pierre David
Un article du blog La Maison Jaune