Damien Chazelle serait-il un prodige ? Dans tous les cas, en même temps qu’il réalise son rêve de gosse, il nous livre ici un film qui est un bonheur de tous les instants.
La La Land, un film de Damien Chazelle
Il faut être complètement inconscient pour s’atteler à un tel challenge à l’époque des blockbusters à tendance intersidérale. Ce challenge, c’est… une comédie musicale ! Mais attention, de plus, une comédie musicale à l’ancienne. Après une scène liminaire qui donne bien le ton (un ballet improvisé sur une autoroute surchargée), l’action est plantée à Los Angeles (L A pour les habitués). Dans la Cité des anges, un seul but, réussir à Hollywood. C’est l’ambition de Mia (Emma Stone un rien monolithique). Pour l’heure elle court les castings, sans trop de succès. Elle va faire la connaissance de Seb (Ryan Gosling, littéralement éblouissant), pianiste, véritable intégriste du jazz qui, pour tenter de réaliser son rêve : monter son cabaret, répond aux sirènes bien payées de la pop commerciale. Entre les deux, le coup de foudre est rapide. Mais des artistes peuvent-ils vivre ensemble et mener des carrières séparées ? Mine de rien, ce thème, non souligné ici, est un vrai problème dans le milieu… Bref, en tout état de cause, après maintes ruptures et réconciliations, une bonne fée veillant sur eux, tout finira par, presque, s’arranger. Et tout cela en chantant et en dansant. Elle n’est pas belle la vie !
Sur une BO de Justin Hurwitz, dont la qualité première est que son thème principal va vous hanter les oreilles pour longtemps, c’est toute une mythologie du cinéma signée Vincente Minnelli, Stanley Donen et Jacques Demy qui explose à l’écran dans cet hommage assumé jusqu’au bout des ongles. Un somptueux travail sur l’image, une caméra virtuose et d’une souplesse hallucinante, des éclairages d’une douceur infinie, des scènes qui vous envoient direct au 7ème ciel sur des chorégraphies que l’on pensait perdues à jamais, un indicible sentiment de nostalgie qui vous envahit, un halo de romanesque, une valse au milieu des nuages, La La Land c’est tout cela et bien d’autres choses que vous découvrirez dans ce film, peut-être un peu long, mais dont le ton merveilleusement, miraculeusement, audacieusement suranné ne peut que vous charmer. Ajoutons, pour souligner la performance de Ryan Gosling ici, que c’est bien lui qui joue du piano. Il vient de tourner un biopic sur Neil Armstrong. Pour l’heure, avec cette lettre d’amour à Los Angeles, c’est lui qui nous envoie au milieu des étoiles.
Robert Pénavayre
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Damien Chazelle – Attention, prodige en vue !
Du haut de ses 32 ans, ce fils de mathématicien et de prof de littérature, qui se rêvait batteur, se tourne assez vite vers le cinéma car il a trop le trac pour se produire en public. Et tant qu’à faire dans le 7ème art, il va apprendre le métier à…Harvard ! Excusez du peu. Son second long, un brin autobiographique, (Whiplash – 2014) récolte 3 Oscars. Il a 28 ans. La La Land a déjà monopolisé la dernière cérémonie des Golden Globes en enlevant 7 trophées et sera la vedette des prochains Oscars avec 14 nominations prestigieuses ! Qu’ajouter de plus, si ce n’est que ce wonder boy est en train de sérieusement envahir le jardin pour l’instant privé d’un autre prodige du cinéma, québécois celui-là. Xavier Dolan tu n’es plus seul !
Damien Chazelle © Olivier Birde / Bestimage