Bernard Rousseau produit un travail assez complexe à la fois dans le fond et dans la forme. Il est un artiste engagé, qui met au cœur de sa production des thèmes comme l’eau, sa surface et sa profondeur, l’invisible ou le refoulé, l’identité, la nature et les éléments de l’urbanisme. Il présente son travail lors de deux expositions liées à l’Espace Saint-Cyprien du 5 janvier au 3 mars 2017 et au Centre culturel Bellegarde jusqu’au 28 janvier 2017. Dans cette double exposition intitulée « Ici est ailleurs », l’artiste évoque ce rapport nature/ville.
Une technique élaborée et singulière
Le travail de Bernard Rousseau fait preuve d’une certaine régularité en ce qui concerne les techniques utilisées. Dans un premier temps, le peintre travaille une cire à la raclette et au chalumeau. Il dessine ou peint ensuite sur du papier de soie, qu’il perfore. Il résine alors un premier dessin sur cette première surface cirée, puis un deuxième, parfois légèrement décalé sur ce même support. Ce décalage crée alors un certain flou. La bichromie caractérise aussi très souvent ses œuvres : du rouge et du bleu (mais ce n’est pas systématique), comme s’il s’agissait d’une image à décrypter en 3D. Bernard Rousseau avoue alors : « J’ai pensé à la 3D, mais je n’ai encore jamais fait le test (rires). C’est la question du double dans le choix des couleurs qui est sous-jacente : déceler les similitudes et les différences et inverser les rapports chromatiques ».
Un fort questionnement politique et écologique
Les œuvres de Bernard Rousseau témoignent de fortes préoccupations à la fois politiques et écologiques. Le peintre l’explique assez aisément : « Dans mon travail, il y a plusieurs axes importants et récurrents. Il y a la question du politique, qui a pris des formes assez différentes : la guerre et sa perception et notamment les images télévisuelles. L’autre grand axe est la question écologique. Le rapport à la nature parcourt mon travail depuis de nombreuses années. Je me retrouve donc en phase avec les questions qui sont soulevées actuellement ».
Au Centre culturel de Bellegarde en janvier prochain, il sera possible de découvrir une installation qui fait terriblement écho à notre actualité. Bernard Rousseau a réalisé une dizaine de barques et de rames en cagettes, plutôt bricolées, qui vont être suspendues au plafond. Le projet n’est pas encore totalement arrêté (la révélation sera donc intacte lors du vernissage en janvier). Et là encore, l’engagement politique de l’artiste est évident : « Il y a une très grande fragilité et très grande précarité dans ces barques. Elles portent en elles, la question des migrations. Il y a un grand basculement actuel et en cela un double rapport : un rapport presque local avec le fleuve mais aussi un écho plus lointain avec tous les drames humains et naufrages qui actuellement nous interpellent. Ce que l’on vit ici est en relation directe avec un ailleurs ».
Une récurrence dans les thèmes abordés
L’étude de la lumière, du mouvement et de la transparence dans les œuvres de Bernard Rousseau semble primordiale. Il souhaite provoquer le mouvement du spectateur devant l’œuvre et surtout la mobilité de son regard : « La surface n’est en général pas arrêtée. L’hypersensibilité de mes surfaces à la lumière, au point de vue et au déplacement est essentielle. C’est très évolutif ». Au cœur de l’espace d’exposition à Saint-Cyprien, Bernard Rousseau souhaite alors tirer profit d’un puits de jour. Il nous décrit l’œuvre imaginée : « Un châssis sur mesure sera installé au niveau du puits. Je vais ainsi réaliser une peinture de cailloux et de poissons. Sous cet espace exactement, je fais fabriquer un socle que je vais couvrir de galets blancs, en espérant que la couleur se dépose légèrement sur les galets. Avec la transparence, j’espère avoir quelques touches de couleurs ».
L’antagonisme nature/ville imprègne aussi le travail de Bernard Rousseau. Ce dernier considère que nous sommes forcément en ville, dans un rapport artificiel à la nature et que le lien s’est distancié au fur et à mesure des années : « On pense à la nature plutôt qu’à la vivre. Il y a un décalage entre une nature naturelle et une nature que je qualifierais d’urbanisée ». Et c’est d’ailleurs autour de cette idée que l’artiste a construit la double exposition « Ici est ailleurs », prévue en janvier prochain : autour de la relation entre la ville qu’il identifie aux chantiers et la présence de la nature avec la Garonne qui traverse et sépare Toulouse.
Nous avons aussi posé quelques questions à Bernard Rousseau : à lire ici
Marjorie Lafon
BERNARD ROUSSEAU
Ici est ailleurs
Peinture, installation
Vernissage : vendredi 6 janvier à 19h30
Exposition du 5 janvier au 3 mars 2017
Espace Saint-Cyprien
56, allées Charles-de-Fitte – 31300 Toulouse – 05 61 22 27 77
Vernissage : vendredi 6 janvier à 18h30
Exposition du 5 au 28 janvier 2017
Centre culturel Bellegarde
17, rue Bellegarde – 31000 Toulouse – 05 62 27 44 88