Le dernier opus littéraire de l’enfant terrible de la scène française, ressemble à une auto psychanalyse en même temps qu’à un règlement de compte en bonne et due règle avec certains hauts lieux du parisianisme mondain et culturel. Les habitués, les familiers de ces milieux savoureront certainement le portrait au vitriol de quelques personnalités croquées ici anonymement.
Au début de ce qui est présenté comme un roman, il y a Aurélien, un jeune provincial, sorte de Rastignac à la beauté aussi sublime que vénéneuse. Il monte à Paris pour réussir dans ce qui est sa passion : le théâtre. Il a tôt fait de comprendre que son physique est peut-être bien le principal atout pour sa réussite. Il va en user. Voire abuser.
Et comme personne ne peut lui résister, son ascension dans le monde des arts va être fulgurante. Tout cela, Olivier Py, actuel directeur du Festival d’Avignon, nous le raconte en imprégnant fortement les réflexions de ses personnages de fortes doses de philosophie, de théologie et de métaphysique.
Justement, ses personnages ; de ministres en chef d’orchestre, de journalistes en lobbyistes, de SDF en travestis, de prostitué(e)s en gigolos, le panorama est large et, pour tout dire, digne de l’Enfer de Dante. Que ce soit à la recherche d’un bout de pain ou d’un carton pour passer la nuit sous un pont, ou bien le combat effréné et sans pitié pour obtenir le poste de directeur de l’Opéra de Paris, les quêtes sont multiples et frôlent des frontières vertigineuses, inconnues du commun des mortels. Le dramaturge nous les décrit sans aucune économie…
Le sexe, dans sa puissance dionysiaque, et la religion, dans son mysticisme exacerbé, sont depuis toujours présents dans les mises en scène d’Olivier Py, laissant parfois le public interrogatif. Ce livre, sans donner toutes les clés, peut incontestablement aider à comprendre la démarche de cet artiste. Même si le but de l’écrivain n’est pas là. Son livre est foisonnant. Si, au début, il peut être déroutant, il finit par se lire comme une drogue car il est formidablement écrit et l’on se prend d’empathie pour Aurélien qui, après bien des certitudes mais aussi des atermoiements, des amours vaincues et des héritages somptueux, tel Icare…
Un livre à ne pas mettre entre toutes les mains, mais qui y songerait d’ailleurs, mais un livre fulgurant mettant en pièce ce microcosme parisien dont on devine à peine la nocivité, la violence, l’avidité, la luxure, un univers que l’on côtoie sans le voir, que l’on traverse sans même le frôler, un monde à part, avec ses règles, ses transgressions et sa lumière noire dont Aurélien est l’un des rayons.
Robert Pénavayre
Une chronique de ClassicToulouse
« Les Parisiens » roman d’Olivier Py – Actes Sud – 537 pages