En écoutant le dernier disque de Vincent Delerm, quelques-uns d’entre nous ont découvert qu’il est possible de regarder vers soi et de s’ausculter sans s’autoapitoyer, de chanter la vie des gens sans grincer, même en considérant qu’on nous parle de bobos, ce qui est vraiment réducteur.
Nous qui avons grandi dans les années 80 en nous laissant ardissoner et qui avons tout tourné en dérision, le culture et la politique (elles le méritent bien), blessés en quelque sorte, nous avons bien besoin de retrouver le parfum agréable et rassurant de la bonté et de l’optimisme, sans passer pour « cul-cul », selon une expression que nous allons retrouver dans la bouche de ce chanteur pour le moins posé mais plein d’humour.
Ce n’est pas facile, le monde est toujours cet absurde chaos, parfois risible, souvent tragique. Mais nos existences sont faites de petites choses aimables et même la nostalgie peut nous faire avancer et progresser sur le chemin épineux qui n’est pas toujours couru d’avance, avec nos amis et nos amours, avec un sourire en coin. Certains trouvent ainsi en Vincent Delerm un pourvoyeur de paix, au moins avec soi-même.
Dans tous les recoins de son album, on trouve aussi des références cinématographiques qui n’ont rien à voir avec Fast & Fury, et des mélodies qui pourraient accompagner un film de Claude Sautet. De temps à autre, une larme peut perler au coin des yeux et sa nature dépend de qui écoute.
Sur une chanson, Delerm partage le micro avec son collègue, camarade, copain, enfin je ne sais pas comment dire, Biolay. C’est plein d’ironie et magique à la fois, une très belle chanson. Ceci dit, il ne manque plus que Miossec pour faire le troisième frère, Renaud et Brigitte Fontaine en papa-maman, et nous avons la famille des ours enroués. Mais où est passée Boucle d’Or? Ah, elle pépie dans le morceau d’ouverture et dans la chanson qui rend hommage à Jane Birkin.
Voilà que les vieilles blagues ressortent.
Je suis donc allé à la rencontre de Vincent Delerm à la mi-octobre ; l’interview a eu lieu sur la terrasse de la FNAC. Nous étions à un mois de son prochain concert dans notre ville, deux ans après une tournée qui avait été scénographiée par notre excellent concitoyen Aurélien Bory.
L’ancien chantre de Fanny Ardant prévoit cette fois-ci de « faire chanter la salle » et de « se reconnecter à la chanson dans ce qu’elle a de plus simple, se souvenir à quel point les chansons font partie de nos vies », avec par conséquent une mise en scène discrète. Au moment où nous discutions, les répétitions n’avaient pas commencé, Delerm ne pouvait pas en dire beaucoup plus.
Mais, sur un ton enjoué et sans s’économiser, il a répondu à toutes les autres questions : ce qu’il voit dans son propre miroir, ce que signifie de vivre dans le présent, doit-on tout sacrifier pour une rime, comment jouer avec ce meuble appelé piano, à quoi bon chanter quand il y a Mossoul et Alep, et même ce que peuvent révéler les lettres d’amour de François Mitterrand et sa réaction au Nobel attribué à Dylan (« Moi je suis très fan de Bob Dylan et si j’avais là, maintenant, deux boutons devant moi, Bob Dylan peut disparaître ou n’avoir jamais existé ou le prix Nobel peut disparaître ou n’avoir jamais existé, j’appuierais sur le prix Nobel qui compte moins pour nous que Bob Dylan… »)
J’avais une caméra et un micro, voici le résultat en vidéo, passé aux ciseaux :
Greg Lamazères
VINCENT DELERM
JEUDI 15 DÉCEMBRE 2016 – 20H30
THÉÂTRE DES MAZADES – TOULOUSE
Tarif : 27 euros
Locations BLEU CITRON : 05 62 73 44 77