Ma vie de Courgette
Courgette est un drôle de petit garçon aux cheveux bleus. C’est sa mère qui lui a donné ce nom assez étrange. Il vit seul avec elle, une femme alcoolique et violente. Alors qu’elle va lui administrer une énième raclée, elle tombe dans l’escalier. Courgette est définitivement orphelin.
Pris en charge par la police dans un premier temps, il a la chance de croiser un flic prénommé Raymond. C’est lui qui, avec d’infinies précautions, va l’emmener dans un orphelinat recueillant ces pauvres gamins sérieusement bousculés par la vie. Là, Courgette va apprendre à grandir, à s’affirmer, il va même rencontrer… Mais auparavant il devra aussi s’intégrer dans ce microcosme enfantin qui réplique les tensions du monde des adultes. Si le terme chef d’œuvre est souvent galvaudé, il est ici parfaitement justifié. Filmé en stop motion, ce film d’animation qui a réclamé plus de deux ans de travail conjugue avec virtuosité techniques d’animation anciennes (les marionnettes) et nouvelles technologies. Imaginez un peu, trois secondes de film étaient réalisées par jour par chaque animateur répartis sur quinze plateaux et ce pendant huit mois ! Il n’y a que la passion pour franchir de pareils obstacles. Ce film a incontestablement une âme.
Dès les premières images, on est saisi par la profondeur des regards, par cette animation ni réaliste ni cartoonesque. Ce que Claude Barras veut nous raconter n’est pas du domaine des Princesses chères à Hollywood. Nous sommes ici au cœur d’un problème social, celui de la maltraitance faite aux enfants, celui de ces familles qui se déchirent voire s’entretuent. Mais par la fenêtre, une branche d’arbre nous fait suivre les saisons et un petit nid nous dit que le Printemps et son cortège de belles choses et de renouveau ne sont jamais bien loin.
A la fois amusant et profond, ce film ne fait l’économie d’aucun questionnement pré adolescence, en particulier ce que vous imaginez, ce qui nous vaut quelques répliques à hurler de rire. Il nous montre aussi combien les cœurs en apparence les plus durs peuvent recéler de trésors de gentillesse. En fait il nous dit plein de choses …sur nous. Ce film est un bijou de tendresse enchâssé dans un écrin d’une rare intelligence. Bravo ! Courez le voir, il est conseillé à partir de 6 ans.
Robert Pénavayre
Ma vie de Courgette
Réalisation : Claude Barras
Durée : 1h06
Genre : animation, drame
Claude Barras : Mon prochain héros sera un bébé orang-outan !
Ce réalisateur suisse de 43 ans a fait pleurer la dernière Quinzaine des Réalisateurs cannoise avant d’entamer une véritable moisson de prix dans le monde entier. Et ce n’est certainement pas fini car la Suisse le présente aux prochains Oscars. Voilà 10 ans que cet ancien élève de l’école lyonnaise Emile Cohl a ce projet en tête. Celui qui avoue bien humblement sa référence à Tim Burton, et comment en serait-il blâmable ? est déjà l’auteur de nombreux courts métrages d’animation mais il a bien vu le moment où Courgette était en péril pour cause de dépassement budgétaire. Miracle, Michel Merkt, cofinanceur entre autre du dernier opus de Xavier Dolan, Juste la fin du monde, entre dans la boucle financière. Courgette est sauvé.