Aujourd’hui, j’ai décidé que j’allais vous emmener vous mettre au vert. Vous en avez besoin, pas la peine de faire votre mauvaise tête. Regardez comme vous êtes tout(e) pâlichon(ne), le manque de lumière de ses premiers jours d’automne commence à se faire sentir, j’ai comme l’impression que vous lâcheriez bien votre codevi contre un petit road trip loin, très loooooooooin de l’agitation urbaine, de la pollution, du bruit des voitures. Je suis sûre qu’un petit retour aux sources, au cœur d’une forêt, sous l’ombre apaisante de grands arbres, vous ferez le plus grand bien.
Les enfants, ne bougez pas, j’ai ce qu’il vous faut !! Suivez – moi !
Ben vit avec ses 6 enfants en pleine nature. Quand j’évoque la pleine nature, je veux vraiment parler Into the Wild (tiens, encore un autre qui nous a donné envie de nous tirer loin loin), de celle qui se trouve aux pieds de montagnes, sans eau courante (à part celle d’impétueux torrents) ni électricité.
Ben a une vision assez particulière de l’éducation, elle s’appuie sur un principe simple : un esprit acéré dans un corps qui ne l’est pas moins. Vous me direz que c’est plutôt chose louable, mais l’homme pousse le concept assez loin puisque la fratrie bénéficie d’un entraînement commando quotidien (avec semi – marathon et centaine de pompes à la clé) et sait aussi bien réduire une fracture, escalader une paroi rocheuse que traquer et dépecer un daim.
Ceci dit Ben ne fait pas partie de ceux qu’on pourrait qualifier d’illuminés, qui prônent le survivalisme à tout crin. Il joue aussi le rôle de professeur auprès de ses enfants, leur apprenant tout autant la physique quantique que les grands classiques de la littérature, développant auprès de sa progéniture la capacité d’analyse, le sens critique, la potentialité à réfléchir par soi – même sans se préoccuper de l’opinion d’autrui mais en étant toujours enclin à la communication et à l’échange.
Et leur mère dans tout ça ? Cela fait plusieurs semaines qu’elle est hospitalisée (ses troubles psychiatriques sont venus troubler l’harmonie de la bande de Robinson), Ben doit d’ailleurs descendre en ville pour aller s’enquérir de l’état de sa moitié.
Hélas, Leslie vient de mettre fin à ses jours. Sous la pression de ses enfants et bien que son beau – père lui ait intimé l’ordre de ne pas venir troubler l’enterrement, Ben décide d’embarquer tout son petit monde dans Steve le bus et de traverser plusieurs états pour aller dire adieu à celle qui fut l’amour de sa vie et la partenaire de ce projet de vie hors du commun.
Matt Ross s’est beaucoup inspiré de son enfance pour nous livrer ce Captain Fantastic. Le réalisateur (qu’on connaît surtout en tant qu’acteur, on l’a vu dans les séries Big love et American horror story) a connu une éducation alternative, couplée à une vie en communauté, au milieu de nulle part, loin de la télévision et des innovations technologiques.
A priori très concerné par les problématiques liés à l’éducation, il a voulu avec son long – métrage explorer, entre autre, les choix qu’imposent les parents à leurs enfants. Le résultat est très réussi car Matt Ross ne se permet jamais de juger ses personnages et pousse encore moins le spectateur à le faire. Il déroule simplement son histoire, en livrant au fur à mesure les différents aspects d’une même situation, nous invitant à nous faire notre propre opinion (un peu comme Ben l’apprend à ses enfants).
Captain Fantastic est un film non pas intéressant (quand vous l’aurez vu, vous comprendrez pourquoi je n’utiliserais plus jamais ce terme de ma vie), mais un film naturaliste qui nous met face à nos contradictions (ceux de la société de consommation, notre rapport aux animaux …), un film qui parle de façon fort juste de la différence, des relations familiales.
Captain Fantastic est également très rigolo, notamment de par la répartie et le naturel de ses jeunes acteurs, absolument épatants (surtout les 2 plus petits). Leurs références, leurs échanges (Ah la scène sur les amendements de la constitution américaine ! Ah le Noam Chomsky day !!) sont de vraies petites perles de dialogue, donné sur un ton désarmant.
Frank Langella joue (bien) le beau – père intransigeant, on est content de retrouver le prometteur Georges MacKay (qu’on avait pas revu depuis Pride et How I live now). Est – ce – que je vous parle de Viggo Mortensen ? Rhoooo, ça va être rapide, il est renversant de justesse, comme à son habitude.
Quoi qu’il en soit, ne boudez pas votre plaisir et allez voir ce Captain Fantastic (mais par pitié, ne visionnez pas la bande – annonce avant, il m’a rarement été donné d’en voir une qui desserve autant le film qu’elle est censé promouvoir !), vous en ressortirez gonflé à bloc. Il est même possible que vous ayez envie de vous installer au sein d’une forêt de sequoias.
En vous remerciant.
Pierrette Tchernio