Biopic – La danseuse
Evoquer Loïe Fuller (1862-1928) revient à parler d’un fantôme. Qui aujourd’hui connaît cette danseuse américaine qui, pourtant, révolutionna la danse au point d’être en partie au moins certainement à l’origine de la grammaire chorégraphique moderne ?
Dès son arrivée en France, elle va triompher aux Folies Bergères. Puis c’est le Palais Garnier qui lui ouvre ses prestigieuses portes. Celle que le public en délire qualifiait de papillon ou d’orchidée, se produisait dans des métrages incroyables de soie (350 mètres carrés !) et les bras prolongés de cannes en bambou. La fameuse Danse serpentine. Très tôt elle fit de l’électricité un auxiliaire précieux de mise en scène. Quitte à se brûler les yeux. Ses numéros, terriblement physiques, nécessitaient de sa part une musculation constante, harassante, traumatisante. Un jour elle décide d’engager une jeune artiste afin de lui faire faire l’ouverture de son programme. C’est Isadora Duncan (1878-1927), c’est-à-dire la grâce à l’état pur, sans fioritures costumières quelconques. Cette danseuse a tôt fait de devenir la coqueluche du Tout Paris, damant ainsi le pion à son pygmalion.
Sur un sujet en or comme celui-ci, il y avait de quoi faire. Ce que nous propose Stéphanie Di Giusto dans son premier long est laborieux et, plus grave, en désaccord avec l’histoire. En effet le présent scénario introduit une bluette entre Loïe et un Comte d’Orsay (Gaspard Ulliel très proustien) qui n’a jamais existé, passant ainsi sous silence la relation lesbienne que Loïe entretint jusqu’à sa mort avec une autre femme. La chose est aujourd’hui assez documentée pour ne pas en faire l’impasse. Soko est une Loïe chez qui il est difficile de sentir la brûlure créatrice, Lily-Rose Depp (la fille de) est une Isadora à peine ébauchée. Seule Mélanie Thierry en régisseuse des Folies Bergères qui suivra Loïe longtemps dans sa carrière, donne corps à son personnage, un rien secondaire malgré tout. Le sujet était là, à portée d’une caméra qu’il eût fallu plus audacieuse.
Robert Pénavayre
La danseuse
Réalisatrice : Stéphanie Di Giusto
Avec : Soko, Gaspard Ulliel, Lily-Rose Depp…
Durée : 1h48
Genre : Biopic
Soko : franco-italo-russo-polonaise, née à…Bordeaux
A peine passé le cap de la trentaine, elle est née en 1985, Stéphanie Sokolinski peut, d’ores et déjà, contempler dans le rétro de sa jeune carrière un parcours hors normes. Le sien. Chanteuse et actrice de cinéma, dernier genre dans lequel elle s’immerge aujourd’hui totalement, son corpus dans le 7ème art est déjà riche de 17 longs métrages. Un 18ème est à venir prochainement. Celle qui vit entre Paris, New York, Londres et Los Angeles est une fan des Beatles, totalement agoraphobe et bisexuelle assumée. Délaissant ses habits de punkette, elle revêt aujourd’hui ceux d’une artiste particulièrement sollicitée.