À l’occasion du trentième anniversaire de sa phalange, Jean-Marc Andrieu dirige l’Orchestre baroque de Montauban Les Passions et le chœur Les Éléments pour un programme réunissant à la Cathédrale Saint-Étienne des œuvres sacrées de Jean Gilles et d’Antoine-Esprit Blanchard, dans le cadre du festival Toulouse Les Orgues et de la saison d’Odyssud.
L’Orchestre baroque de Montauban Les Passions fête cette année son trentième anniversaire. Fondateur et directeur musical de cette phalange réputée bien au delà des frontières régionales, Jean-Marc Andrieu se montre très attaché au baroque méridional. Après plusieurs années de recherches musicologiques et historiques sur les compositeurs issus de l’école d’Aix qui ont marqué la musique sacrée, il a consacré trois enregistrements à la restitution des œuvres majeures de l’un d’eux, Jean Gilles, dont on réentendra le Requiem à Toulouse.
Né à Tarascon, nommé maître de chapelle de la cathédrale de Toulouse en 1697, il y succède à André Campra et y meurt à l’âge de 37 ans. Jean Gilles a composé de somptueuses œuvres sacrées, dont un Requiem exécuté pour la première fois, selon sa volonté, à ses obsèques en 1705, sous la direction de Campra. Il sera donné ensuite aux funérailles du compositeur Jean-Philippe Rameau et à celles du roi Louis XV. Musicien célébré et fréquemment joué au XVIIIe siècle, Jean Gilles a déjà fait l’objet de plusieurs enregistrements, notamment ceux d’Hervé Niquet à la tête de son ensemble Le Concert Spirituel, ou encore Philippe Herreweghe avec la Chapelle Royale mais aussi avec le Collegium Vocale et le Musica Antiqua Köln.
Respectant au plus près ce qu’il pense être leur version originale, Jean-Marc Andrieu s’est attaché à restituer l’esprit d’origine des œuvres, expurgées d’interprétations postérieures. Il a confronté «différentes sources provenant entre autres de la Bibliothèque nationale, de la bibliothèque de Bordeaux et de manuscrits privés», dans un «souci de rendre le discours à la fois raffiné et simple – le style de Gilles, teinté d’italianisme provençal, est naturellement chantant et dansant». Les travaux de l’historien toulousain Pierre Salies et la consultation de registres conservés à Toulouse lui ont permis d’évaluer les effectifs instrumentaux d’époque et d’approcher la prononciation du latin.
Enregistré et interprété à la Cathédrale Saint-Étienne par l’orchestre Les Passions et le chœur Les Éléments, le Requiem a été publié en 2008 par le label Ligia. Il a été suivi deux ans plus tard par les Lamentations, puis par le Te Deum – composé à l’occasion de la paix de Ryswick – couplé à la Messe en ré, œuvre inédite révélant une nouvelle facette du compositeur. Odyssud et le festival Toulouse Les Orgues accueillent à la Cathédrale Saint-Étienne un concert des Passions et du chœur Les Éléments au cours duquel l’emblématique Requiem de Gilles et deux motets à grand chœur d’Antoine-Esprit Blanchard seront dirigés par Jean-Marc Andrieu. Né en Provence en 1696 et anobli par Louis XV, Antoine-Esprit Blanchard a été sous-maître de la Chapelle Royale de Versailles. Jean-Marc Andrieu a exhumé pour l’occasion son Magnificat et son «In exitu Israël». Réalisé cet été au Festival de Radio France et Montpellier, l’enregistrement de ces œuvres inédites est aujourd’hui disponible chez Ligia.
Également donné à Montauban, le programme de ce concert s’accompagne de moult manifestations à l’occasion de l’anniversaire des Passions, dont un colloque à l’Université Toulouse Jean-Jaurès intitulé «Musique, culture et identités dans les provinces du Sud-Ouest de la France». À Toulouse, la Bibliothèque d’étude et du Patrimoine accueille une exposition dédiée aux « maîtres du baroque méridional ». Elle réunit des manuscrits musicaux, autographes de compositeurs, partitions imprimées et estampes, autant de témoignages de la vie musicale dans le Midi sous l’Ancien Régime – période marquée par un fort centralisme politique et culturel. Capitale provinciale du Languedoc, Toulouse abritait alors deux grands centres religieux et leur maîtrise, la cathédrale Saint-Étienne et l’abbatiale Saint-Sernin qui assuraient l’animation musicale de la cité – qu’il s’agisse d’enseignement, de représentation ou de création. Compositeurs régionaux renommés, Jean Gilles, André Campra, Joseph Valette de Montigny et Bernard-Aymable Dupuy furent maîtres de chapelle de l’une ou de l’autre.
Jérôme Gac
Requiem de Gilles, motets de Blanchard :
jeudi 6 octobre, 20h30, cathédrale Saint-Étienne,
place Saint-Étienne, Toulouse. Tél. : 05 61 71 75 10.
Colloque :
jeudi 6 et vendredi 7 octobre,
Maison de la Recherche de l’Université Jean-Jaurès,
5, allées Antonio-Machado, Toulouse.
Exposition :
«Les maîtres du baroque méridional»,
jusqu’au 15 octobre, du mardi au samedi, de 10h00 à 19h00,
Bibliothèque d’étude et du Patrimoine,
1, rue du Périgord, Toulouse.
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photos :
Les Passions © C.V.
J.-M. Andrieu © Jean-Jacques Ader
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