Compte rendu, concert ; Paris ; Philharmonie de Paris, le 16 septembre 2016 ; Robert Schumann (1810-1856) : Scènes du Faust de Goethe ; Chœur d’enfants et Chœur de l’Orchestre de Paris ; Orchestre de Paris ; Daniel Harding, direction.
L’Orchestre de Paris a donné ce soir son premier concert sous la direction de son neuvième chef attitré. Daniel Harding a choisi une œuvre aussi rare que belle et difficile : Les Scènes du Faust de Goethe de Robert Schumann. Vaste partition en forme d’oratorio, elle requiert outre un orchestre fourni, un grand chœur et un chœur d’enfants ainsi que de nombreux solistes dont trois voix d’enfants. Daniel Harding a donc tenu dans sa main de velours, ferme et vivifiante près de 300 musiciens et chanteurs. Le résultat est enthousiasmant. La partition de Schumann est la seule, et je pèse mes mots, à rendre compte de la dimension philosophique de l’immense ouvrage de Goethe : Gounod a écrit d’avantage une Margarethe qu’un Faust et Berlioz a manqué de profondeur même si il a su rendre compte de la dimension fantastique comme nul autre. Daniel Harding a pris à bras-le-corps la partition schumanienne et a su la mener à bon port c’est à dire vers l’au-delà. Une direction ferme, nuancée, dramatique mais également pleine de délicatesse et de finesse. Une attention permanente aux équilibres parfois complexes nous a permis d’entendre chaque mot de Goethe y compris avec les enfants solistes remarquables de présence fragile et émouvante.
Un Faust magistral
Les solistes ont tous été choisis avec soin. Les deux sopranos Hanna-Elisabeth Müller et Mari Eriksmoen ont été remarquables de beauté de timbre, de lumière et d’implication dramatique. Deux très belles voix de sopranos qui sont en plus de très belles femmes élégantes et rayonnantes. Le ténor d’Andrew Staples est une voix de miel et de texte limpide avec une grande noblesse. Les deux basses Franz-Josef Selig et Tareq Nazmi sont parfaits de présence, surtout le premier en malin. Bernarda Fink de son beau timbre noble et velouté a, dans chaque intervention, et parfois très modeste, marqué une belle présence d’artiste. Le grand triomphateur de la soirée est Christian Gerhaher dans une implication dramatique totale que ce soit dans Faust amoureux ou vieillissant et encore d’avantage en Pater Seraphicus et en Dr. Marianus. La voix est belle, jeune et moelleuse. Les mots sont ceux d’un liedersänger avec une projection parfaite de chanteur d‘opéra. Ces qualités associées en font l’interprète rêvé de ces rôles si particuliers.
L’Orchestre de Paris a joué magnifiquement, timbres merveilleux, nuance subtiles et phrasés amples. L’orchestration si complexe de Schumann a été mise en valeur par des interprètes si engagés. Les chœurs très sollicités ont été à la hauteur des attentes et tout particulièrement les enfants. Ils ont été admirablement préparés par Lionel Sow, plus d’un a été saisi par la puissance dramatique des interventions.
Une très belle soirée qui est a été donnée deux fois (reprise le 18 septembre) une grande œuvre qui n’a et de loin, pas assez de présence dans nos salles. Sa complexité et le nombre des interprètes ne sont pas étrangers à cette rareté. En tout cas la salle bondée a été enthousiasmé. Le public est là pour cette œuvre pourtant réputée difficile quand des interprètes de cette trempe nous l’offre ainsi. Le soir de la première toutes les places de la vaste salle de la Philharmonie ont été occupées. Daniel Harding a ainsi amorcé avec panache sa complicité avec l’Orchestre de Paris et avec le public.
Hubert Stoecklin
Compte rendu concert ; Paris ; Philharmonie de Paris, le 16 septembre 2016 ; Robert Schumann (1810-1856) : Scènes du Faust de Goethe ; Hanna-Elisabeth Müller, Mari Eriksmoen, sopranos ; Bernarda Fink, mezzo-soprano ; Andrew Staples, ténor ; Christian Gerhaher, baryton ; Franz-Josef Selig, Tareq Nazmi, basses ; Chœur d’enfants et Chœur de l’Orchestre de Paris : Lionel Sow, Chef de chœur ; Orchestre de Paris ; Direction, Daniel Harding.
Photo : Silvia Lelli