du 29 juillet au 15 août 2016
L’automobiliste qui traverse Marciac en hiver ne se doute pas que le village du Gers s’apprête à revêtir l’habit de lumière bleue pour écrire son nouveau manifeste estival. Cette esthétique de l’éphémère (un éphémère qui perdure désormais dans la programmation annuelle de L’Astrada) possède un titre qui dit bien l’irruption d’un art musical majeur sur sa terre d’adoption : « Jazz in Marciac ». Son existence jazzée définit Marciac comme Sartre l’entendait pour décrire la responsabilité de l’homme libre. Le village vit ainsi sa double vie, double preuve de liberté qui tient en ces mots : Marciac a choisi le jazz.
À moins que ce ne soit l’inverse : mot trop simple pour décrire une réalité plus que jamais multiforme, le jazz de cette trente-neuvième édition consacre, adoube, explore. Le chapiteau (6.000 fidèles bien alignés!) prendra cet été des allures de temple. Ainsi Ahmad Jamal, styliste unique du piano, homme des à-pics vertigineux et des silences lourds de notes à venir, y donnera son seul concert de l’année. Cela s’appelle un événement.
Puis il y aura les voix incontestables, celles qui ne déçoivent pas : Dianne Reeves, diamantine et enracinée, Jamie Cullum, double comprimé de vitamines jazz et pop, Hugh Coltman, qui propulse Nat King Cole dans le XXIè siècle. Il y aura les options latines -elles n’ont jamais quitté le cursus marciacais – où les déclinaisons de la clave sont scandées par de subtils acrobates de leur instrument : David Sanchez, Michel Camilo, Gonzalo Rubalcaba, Roberto Fonseca, de l’or aux lèvres, de l’or aux doigts.
Point de jazz sans rencontres : quelle déflagration nous préparent Yaron Herman et le chanteur « M » ? Ou les zig zags puissamment déliés de Stefano Di Battista devant les festons groovy de Kyle Eastwood ? Poussière d’étoiles, aussi, avec les stars récemment « grammysées » : le guitariste John Scofield avec son groupe rétro-moderne, la cohorte anticonformiste Snarky Puppy.
Retrouvailles avec John McLaughlin, homme des fusions spirituelles ; Lucky Peterson, qui retourne à l’orgue Hammond le temps d’un hommage à Jimmy Smith, Fred Wesley et Maceo Parker, l’essence du funk et de la soul approuvée publiquement dans l’ombre luisante de James Brown.
Enfin, il y a ce goût d’éternel retour avec celui qui – tel ce chevalier Gascon – regagne immanquablement Marciac, trompette mouchetée, avec l’élégance intemporelle des dépositaires d’une histoire qui réclame sa part de présent : Wynton Marsalis. C’est encore aujourd’hui la botte secrète du festival.
Chazz Belmonte
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