Chaque mercredi, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir un film américain passé inaperçu lors de sa sortie.
Gregory Hoblit fait partie de ces cinéastes anonymes qui font tourner la machine à rêves hollywoodienne. Ce ne sont pas des génies, ni de grands réalisateurs, juste d’honnêtes artisans capables du meilleur, du moyen comme du médiocre. Ils s’appellent Mark Pellington, John Flynn, James Foley, Ron Shelton ou Luis Mandoki. Leurs noms n’éveillent pas grand-chose. On se souvient plutôt des stars à l’affiche de leurs films. Comme beaucoup d’entre eux, Gregory Hoblit, né en 1944 au Texas, a d’abord fait ses armes à la télévision où il produisit et réalisa des séries télévisées (New York Police Blues, La Loi de Los Angeles…) avant de passer au grand écran en 1996 avec Peur primale, thriller judiciaire qui lança le tout jeune Edward Norton.
Suivront l’excellent Le Témoin du mal (1998), un autre thriller lorgnant cette fois sur le fantastique avec Denzel Washington aux prises avec des esprits maléfiques, Mission évasion (2002), qui ne parvint pas à faire oublier La Grande évasion, La Faille (2007) avec Anthony Hopkins et Intraçable (2008) avec une Diane Lane convaincante en enquêtrice du FBI poursuivie par un serial killer. Mais le film le plus passionnant du cinéaste est sans conteste Fréquence interdite, encore un thriller aux frontières du réel sorti en 2000.
John Sullivan, jeune inspecteur de police new-yorkais, est toujours hanté par la mort de son père, sapeur-pompier disparu trente ans plus tôt en mission. Une nuit, John remet en marche un vieux poste radio émetteur et entre en contact avec un inconnu. Celui-ci prétend vivre en 1969 et rapidement le policier reconnaît la voix de son père. Le fils lui évite l’accident fatal qui lui coûta la vie, mais on ne modifie pas impunément le cours du passé. À trente ans de distance, les deux hommes vont se lancer sur les traces d’un tueur en série qui, dans la nouvelle tournure qu’ils ont donné aux événements, a assassiné celle qui était la femme de l’un et la mère de l’autre… Outre l’originalité de son scénario, l’habileté de Fréquence interdite est de rendre crédible la dimension fantastique du récit et son enquête criminelle multidimensionnelle. On passe ainsi d’une époque à l’autre et surtout d’une éventualité à une autre. Selon les inflexions données au réel en 1969, des êtres disparaissent ou réapparaissent trente ans plus tard.
Si ce conte noir et malgré tout émouvant fonctionne, c’est aussi en grande partie grâce à deux interprètes exceptionnels. Dennis Quaid (qui joue le père) n’a curieusement pas retenu l’attention des cinéastes importants de son époque (Scorsese, Eastwood, les frères Coen, Tarantino…) et a donné le meilleur de lui dans des films souvent passé inaperçus (Flesh & Bone, Savior…). Face à lui, on retrouvait Jim Caviezel, découvert dans La Ligne rouge de Terrence Malick et qui se révèlera une nouvelle fois impressionnant en interprétant le Christ devant la caméra de Mel Gibson. Avant cela, c’est à une autre résurrection qu’il se livrait dans cette Fréquence interdite à redécouvrir.
Fréquence interdite
De Gregory Hoblit
Avec Dennis Quaid, Shawn Doyle, Jim Caviezel