le Festival Extrême Cinéma édition 2015 commence mardi 3 novembre 2015 à la Cinémathèque de Toulouse.
Tous les renseignements sont ici.
L’un des deux co-programmateurs, Monsieur Franck Lubet, vous dévoile des films qu’il aime. Tout comme ceux du Professeur Thibaut, ça envoie du bois !
Le film qui vous a causé votre premier choc cinématographique.
Je pense qu’il y en a d’autres, mais Les Dents de la mer m’avait traumatisé. Je trouve ce film absolument génial, il y a une maîtrise. À la base il y avait un problème technique, on devait vraiment voir le requin sauf que le mécanisme ne marchait pas et c’est pour ça qu’il y a les bidons. C’est une vraiment idée de cinéaste et ça fait monter la pression. 1, 2, 3 bidons et ils disparaissent. Du coup, la créature est là sans la voir. Comme Tourneur, faire peur sans montrer, en suggérant, c’est très fort. J’en ai fait des cauchemars et après, l’été à l’océan, je ne voulais pas me baigner.
Sans toit ni loi aussi, dans un autre genre, m’a complètement traumatisé. Ça me faisait peur enfant de me retrouver à la rue.
Le film que vous offrez le plus.
Je n’offre pas de film.
Le film que vous ne vous lassez pas de revoir.
Rio Bravo, j’adore ce film. Après, il y en a plein que je revois.
Le film qui vous fait dire « il devrait être obligatoire au Bac ! ».
Dans un mois j’en dirais un autre, mais là c’est Play dirty d’André de Toth. Je le trouve quasiment parfait. Un film de guerre qui n’est pas antimilitariste mais qui montre vraiment la connerie de la guerre, je trouve que c’est un film qui a plusieurs degrés de lecture. Cinématographiquement, ce film est remarquable, plein d’idées de mise en scène à l’économie, et sur la guerre et l’homme c’est un film qui amène à réflexion, qui part de l’idée que la guerre c’est une saloperie et donc il faut être un salopard pour la faire. C’est un film avec uniquement des personnages hyper cyniques, aucun de positif, et tout ça est vu avec une ironie de la part de de Toth. Ça fait un mélange très étonnant qui amène du recul. C’est un réalisateur très sec : il y a peu de dialogues, c’est l’anti-Tarantino. La fin est d’une sécheresse incroyable ! Donc ce serait bien que les petits jeunes qui adorent Tarantino regardent des films un peu théseux et où du coup des choses passent autrement en fait que par de longues logorrhées qui ne veulent rien dire.
En western, un truc plus classique, L’Homme qui tua liberty Valance quand même, c’est intéressant aussi sur la question du point de vue, sur cette question sur la légende, la vérité. Il y a ce truc fort, assez génial parce qu’on retient le toujours : quand la légende est plus forte que la vérité, on imprime la légende, ce qu’on a retenu, sauf qu’en fait le film de Ford montre la vérité. C’est intéressant cette différence entre ce qui est dit et ce qui peut être retenu, parce que c’est une belle formule. Et en même temps, le film va à l’encontre de cette formule retenue. C’est un des rares films justement où t’as une scène-clé et tu revois la même scène d’un point de vue différent et ça change complètement. Et je trouve çà intéressant pour des jeunes sur la question du cinéma, la construction, la question du point de vue, la question de la manipulation, ça va jusqu’à aujourd’hui avec ce qu’on montre : est-ce qu’il faut prendre comme argent comptant une image ou pas ?
Le film qui vous fait dire « c’est mon histoire, ça ! »
Ce n’est pas vraiment mon histoire mais je m’y suis retrouvé complètement, c’est Amour d’enfance d’Yves Caumon. Un jeune gars d’origine paysanne est sur Paris, son père est mourant et il revient à la ferme. Du coup, il y a fracture entre quelqu’un qui a fui la campagne pour y revenir, qui finalement est un autre, qui se retrouve être celui qu’il était la campagne mais qui n’est plus lui-même aujourd’hui. C’est quelque chose que je ressens par exemple quand je rentre chez mes parents, je me conforme à l’image de moi qui est restée là-bas mais qui n’est pas celle que je suis au quotidien. Quand je l’ai vu, j’ai pensé que cela allait être un truc néo-rural-machin mais au final, je trouve que c’est un film hyper juste sur cette question des racines que tu as quittées et qui sont toujours là malgré toi.
Le film dont vous avez repoussé le visionnage à cause d’un gros préjugé et qui vous fait dire « les préjugés, c’est tout pourri ».
Peut-être par exemple Brigadoon que je ne regarderais pas comme ça à cause de ces préjugés, parce que la comédie musicale n’est pas mon style au départ. Mais là, c’est Minnelli, il y a une magie. Je ne sais pas si on peut appeler ça préjugé, c’est juste une connaissance de goûts, je sais ce qu’il me plaît et ce qu’il me plaît pas. Et là, c’est la surprise de me dire que c’est bien.
Le film dont vos amis disent « tu regardes ça, toi ? ».
Ceux qui me connaissent savent très bien que je regarde tout, à part Christophe Honoré. Donc l’affaire est entendue, sauf si un jour je te dis que je suis allé voir un film de Christophe Honoré, là tu pourrais me dire « Ah, tu regardes ça, toi ? » (gros rires taquins envers moi car Franck connait mes goûts)
Le film que vous n’avez jamais rendu à son propriétaire… d’ailleurs, il peut toujours courir pour le récupérer.
Je ne sais pas ce que j’en ai faits, c’est pour ça que je ne les pas rendus. Mais je n’ai pas de titre qui me vient là…
Le film qui vous fait voyager et qui vous a décidé à aller dans les lieux décrits.
Non, je n’ai pas fait de pèlerinage.
Le film qui vous enracine.
Les Dieux sont tombés sur la tête, je ne l’ai pas revu, mais rien que le titre me rappelle un moment particulier. J’étais adolescent chez mon père à Noël, on avait fait un repas, et vers 22h00, mon père est allé se coucher, mon frère plus jeune était au lit aussi. J’étais tout seul et il y avait ce film qui passait sur Canal +. A 22h30, c’est le soir de Noël, tu es tout seul, t’es en train de regarder ce qui est censé être une comédie et c’est assez mélodramatique. Il y a un côté triste à la chose. Et je me disais qu’en fait, je déteste Noël. Ça me rappelle un moment de solitude alors que c’est familial, on s’offre des cadeaux. Moi, je me rappelle avoir regardé tout seul Les Dieux sont tombés sur la tête.
Le film qui devrait être remboursé par la sécurité sociale.
Un jour, je m’étais justement fait une réflexion sur un film en me disant que si je devais écrire dessus, je dirais qu’il devrait être remboursé par la sécurité sociale. C’est The Devil’s rejects de Rob Zombie, un film complètement enragé, qui te met d’abord la rage puis du coup te calme. Comme dans un concert de bourrin, tu te lâches et après t’es apaisé. J’ai tellement la rage en le voyant qu’après je l’ai moins. Ça devrait être remboursé par la sécurité sociale ou par le ministère de l’intérieur parce que du coup, tu ne vas pas brûler de voiture. Tu regardes The Devil’s rejects et ça va mieux.
Le film dont vous pouvez réciter des dialogues par cœur.
Comme je n’ai pas de mémoire, aucun.
Le film qui est votre dernier coup de cœur.
Réponse en novembre 2014 : C’est Le Convoi de la Peur cette année. Je n’avais jamais vu le film et c’est du pur bonheur.
Réponse en novembre 2015 : J’ai beau y avoir réfléchi toute la nuit, le seul vrai coup de cœur que j’ai eu ces derniers temps, c’est pour une BD Zaï zaï zaï zaï de Fabcaro.