« Marguerite », un film de Xavier Giannoli
Librement inspiré de la vie de Florence Foster Jenkins, soprano (?) américaine (1868-1944), le dernier opus du réalisateur français oscille entre émotion et humour.
Depuis toujours fascinée par le monde de l’opéra, FFJ, riche à milliards de dollars, consacra sa vie à l’art lyrique dont elle pensait être l’une des plus glorieuses représentantes. Problème, cette brave femme chantait comme une casserole trouée. Autre problème, vue sa gentillesse et sa générosité, personne n’osait le lui dire. C’est ainsi qu’entre les récitals privés qu’elle donnait dans son château et la consécration ultime que fut son récital, public, au Carnegie Hall de New York en 1944, FFJ fit une « carrière ». Transposée dans le Paris des années 20 du siècle dernier, cette histoire rocambolesque nous fait pénétrer des mondes interlopes dans lesquels se croisent des anarchistes de tout crin, des Rastignac aux petits pieds, des ténors archaïques et leur cour, tout un univers dans lequel Marguerite, baronne Dumont, évolue comme un poisson dans l’eau, ignorant, ou feignant d’ignorer la rapacité de ceux qui l’entourent. Outre les aventures lirico-improbables de la pseudo diva, Xavier Giannoli développe un autre thème, celui de l’amour qui unit Marguerite à Georges, son mari, un amour fracturé par la folie. Georges trompe Marguerite, mais cette dernière continue de chanter en espérant toujours que son bien-aimé sera assis au premier rang. Mais pour Georges, le mensonge finit par être trop lourd à porter. Et pourtant, tout le monde le sait, lui dire la vérité peut être mortel…
Une distribution au cordeau, dominée par une Catherine Frot impériale d’inconscience, et une mise en scène de grande qualité font de cette réalisation un film formidablement attachant qui lève un voile sur une « personnalité » en tout état de cause hors du commun. L’an prochain, Stephen Frears proposera un authentique biopic de FFJ, avec Meryl Streep dans…le rôle-titre.
Robert Pénavayre