J’aurais du mal à le nier, j’aime beaucoup Michel Gondry.
On met souvent en avant le côté Jojo – le – bricolo – sous – acide de ses films. Mais ne résumer leur auteur qu’à quelques brins de fil chenille et une caméra super 8 est à mon sens un rien couillon.
Michel Gondry, c’est une faculté à faire tomber les barrières, une aisance à travailler partout (aux États – Unis, en langue anglaise) sans jamais renier un instant ses origines profondément françaises. Michel Gondry, c’est une intelligence fine qui n’essaye pas d’en mettre plein la vue, c’est aussi beaucoup d’humour et pas mal de mélancolie. L’ami Michel, c’est enfin et surtout un imaginaire incroyable, débridé, ludique, adroitement mis en images et dans lequel on se sent toujours bienvenu.
Alors, si dans le dernier – né de la galaxie Gondryenne il est bien question d’une maison faite de bric et de broc et montée sur roues, n’allez pas tirer de conclusion trop hâtive.
Dans son collège versaillais, Daniel dit Microbe, fait un peu figure d’ovni. Celui qui se cache derrière des cheveux longs et se désespère qu’on l’on prenne aussi souvent pour une fille, aimerait que Laura l’entrevoie autrement qu’un bon copain. S’il le pouvait, il s’échapperait d’une famille où sa mère, mi – prête à suivre le premier gourou qui passe mi – dépressive, l’étouffe de trop d’inquiétude.
C’est là que débarque Théo (dit Gasoil, de par ses activités de mécano), fort en gouaille mais tout aussi inadapté que lui au microcosme collégien. Ils vont devenir les meilleurs copains du monde et Daniel va passer de plus en plus de temps dans la maison de Théo (où s’entassent les objets glanés par le paternel, antiquaire). Tous les 2 vont mettre en branle un projet un peu fou : fabriquer leur propre voiture et partir sur les routes.
Alors qu’après le tournage de L’écume des jours, Michel Gondry s’apprêtait à enchaîner sur l’adaptation d’un autre roman (Ubik de Philippe K. Dick), Audrey Tautou (ici, daronne de Daniel, excellente) lui conseille de réaliser un long – métrage à résonance personnelle. C’est ainsi que naît Microbe et Gasoil, pour lequel le réalisateur a pioché dans ses propres souvenirs adolescents.
De sa famille bizarroïde à son amour du dessin, de ses premiers élans amoureux à des questionnements très basiques sur le sexe, Michel Gondry fait disserter ses philosophes en herbe (Ange Dargent et Théophile Baquet, tous les 2 très à l’aise devant la caméra) dans de savoureux dialogues. Transposant le récit à l’heure actuelle mais en occultant le décorum des iphones, écran plats et autre snapchat (ce qui diffuse un petit côté suranné charmant et très reposant), le long – métrage se focalise sur l’essentiel, abordant la (vaste) question de l’amitié et tout ce que l’on est prêt à faire pour elle.
En résulte un film tout ce qu’il y a de plus attachant, joyeux et juste ce qu’il faut contemplatif.
Je vous invite d’ailleurs à aller voir Microbe et Gasoil en compagnie de vos enfants, neveux, petits voisins ou n’importe quel ado de votre connaissance, je suis certaine que vos débats post – séance ne manqueront pas de sel (je peux vous assurer m’être régalée de ceux émis par les enfants – nombreux ! – présents lors de la projection où je me suis rendue).
En vous remerciant.
Pierrette Tchernio