L’Orchestre National du Capitole et son directeur Tugan Sokhiev offrent un programme musical cohérent et néanmoins diversifié. En effet, les trois compositeurs issus d’Europe Orientale qui y figurent possèdent des personnalités très marquées, au-delà de leur communauté culturelle. Janáček, Martinů et Rachmaninov brossent ainsi un riche tableau de la création musicale au début du 20ème siècle. L’altiste Antoine Tamestit, l’un des plus brillants représentants des grands interprètes français du moment, sera le soliste de cette soirée.
La Sinfonietta, de Leoš Janáček, ouvrira la soirée. Né le 3 juillet 1854 à Hukvaldy (Moravie) et mort le 12 août 1928 à Ostrava, Janáček est en quelque sorte le successeur tchèque de Dvořák, auquel le liera une longue amitié. Dvořák critiquera d’ailleurs, à titre amical, ses premières compositions et influencera durablement son écriture. La Sinfonietta est une œuvre pour orchestre en cinq mouvements composée en 1926 à la suite d’une commande de l’organisation de gymnastique tchèque Sokol. Le compositeur, en hommage à l’armée tchèque, la baptisa « militaire », la dotant d’une instrumentation riche en cuivres. Hymne à la vie et à la nature, hommage à la ville de Brno, la Sinfonietta fut jouée pour la première fois le 26 juin 1926 à Prague sous la direction de Václav Talich.
C’est la Symphonie n° 2 de Sergeï Rachmaninov qui conclura le concert. Lorsqu’en 1906 il entame la genèse de cette deuxième symphonie en mi mineur, Rachmaninov (1873-1943) sort d’une longue dépression causée par le véritable naufrage de sa première symphonie. A l’issue de cette pénible période, le jeune compositeur met en chantier une œuvre nouvelle dans un contexte radicalement différent : il s’est installé en Allemagne, à Dresde, où il déploie une prodigieuse activité. La Symphonie n°2 porte la marque de cette sérénité reconquise. Œuvre orchestrale la plus ambitieuse de Rachmaninov, elle a été créée sous sa direction à Saint Pétersbourg, le 26 janvier 1908. Juste retour des choses, elle suscita l’enthousiasme des auditeurs.
Avec l’Orchestre National du Capitole et Tugan Sokhiev, Antoine Tamestit a choisi de jouer la Rhapsodie-Concerto de Bohuslav Martinů (1890-1959) qui s’inspire profondément de thèmes bohémiens. Lorsque Martinů met en chantier cette œuvre de pleine maturité, il est exilé aux Etats-Unis, à la suite de l’invasion de la Tchécoslovaquie par l’Allemagne nazie en 1939. La Rhapsodie-Concerto concilie les expériences passées du compositeur et un élan nouveau. Elle recompose en quelque sorte l’héritage tchèque : Martinů choisit pour motif principal quatre notes tirées du Requiem de son compatriote Dvořák. De plus, le choix de l’alto évoque Bartók – autre compositeur de l’Est exilé aux Etats-Unis – et son Concerto pour alto. Comme de nombreux compositeurs de la Mitteleuropa, Martinů creusait le sillon d’une tradition slave à qui les Etats-Unis offrirent asile.
Né en 1979, Antoine Tamestit se révèle à l’attention internationale en remportant le Premier Prix au concours Maurice Vieux (Paris, 2000), puis au concours William Primrose (Chicago, 2001). Il est nommé « Révélation instrumentale de l’année » aux Victoires de la Musique classique 2007. Son répertoire s’étend du baroque au contemporain, le conduisant à jouer et enregistrer de nouvelles œuvres : le duo Viola, Viola de George Benjamin avec Tabes Zimmermann et le Concerto pour deux altos de Bruno Mantovani, écrit pour lui et Tabea Zimmermann. Il est l’invité des grands festivals : Lockenhaus, Lucerne, Davos, New York Mostly Mozart, Salzbourg, Folles Journées de Nantes et Tokyo… En 2008, il crée le Trio Zimmermann avec Christian Poltéra et Frank Peter Zimmermann. En 2009/2010, le Konzerthaus de Berlin lui offre une carte blanche puis il crée un concerto écrit pour lui par Olga Neuwirth. Il collabore avec le Gewandhaus de Leipzig, le Deutsches Symphonie-Orchester de Berlin, l’Orchestre radio-symphonique de Vienne, le Netherlands Phiharmonic Orchestra, l’Orchestre de la Suisse Romande, le BBC Philharmonic Orchestra, le London Symphony Orchestra, la Deutsche Kammerphilharmonie de Brême, l’Orchestre Philharmonique de Radio France… Antoine Tamestit joue un alto Stradivarius de 1672, prêté par la Fondation Habisreutinger.
Serge Chauzy
Une Chronique de Classic Toulouse
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