Il y a une vie après « Intouchables »
Avec 20 millions d’entrées pour leur avant-dernier opus, on pouvait légitimement se poser la question du devenir des réalisateurs Olivier Nakache et Eric Toledano après ce blockbuster hexagonal que fut « Intouchables ». Inutile de se poser la question plus longtemps, Samba apporte une foudroyante réponse. Loin de se reposer sur leurs lauriers, ils ont repris le chemin du travail et nous offrent aujourd’hui un film peut-être un peu long (2h), mais d’une facture somptueuse. Quittant l’univers lambrissé des paralytiques milliardaires, ils nous amènent dans le monde des sans-papiers. On imagine qu’il était difficile pour eux de laisser à quai Omar Sy. Pour de multiples raisons d’ailleurs. Voici donc de nouveau la nouvelle star du cinéma français, aux prises cette fois avec un rôle de sans-papiers sénégalais. C’est lui Samba. Nous le croisons pour la première fois dans un centre de rétention. Le renouvellement de son permis de séjour lui étant refusé, il est prié de dégager du sol français. Allant chercher de l’aide dans une association de secours aux sans-papiers, il se trouve alors devant Alice (Charlotte Gainsbourg), une bénévole encore plus paumée que lui. Elle vient de quitter son job de cadre supérieur à la suite d’un burn out, traduisez un ras le bol qui mettait sa santé en péril. C’est le coup de foudre. Bien sûr il ne va pas se révéler comme ça, il faudra un peu de temps à ces deux victimes de notre société pour s’en rendre compte. Le cheminement de leur sentiment prendra toute la durée d’un film terriblement attachant, émouvant, spirituel, subtilement malin et finalement engagé pour dénoncer le sort que la France réserve à ces pauvres hères du monde industriel.
D’autres personnages vont venir se joindre à cette idylle. Il y a Manu (Izia Higelin). C’est elle qui apprend à Alice les rudiments de sa collaboration à l’association. Et surtout à ne pas entrer en empathie avec les sans-papiers. Trop tard ! Il y a aussi Marcelle (sublime Hélène Vincent) dont la mission dans l’asso en question tient de la vocation spirituelle. Et puis il y a Wilson, l’électron libre du film. Arabe se faisant passer pour Brésilien, Tahar Rahim compose ici un personnage d’une incroyable souplesse de ton. A vrai dire, on découvre les talents cachés de ce comédien pour l’instant cantonné à des rôles dramatiques. Et c’est un feu d’artifice de drôlerie et de spontanéité. Conjuguant l’humour et la gravité sans une faute, il nous offre le grand bonheur d’un film qui pourtant n’en est pas avare. A commencer par Omar Sy, impérial avec ses regards perdus, énamourés et sa dégaine gigantesque doublée d’une nonchalance bien identifiable. Au total une comédie sociale d’une profonde humanité qui prend le parti de nous amuser pour mieux abaisser nos défenses et nous asséner les terribles vérités qui nous entourent.
Robert Pénavayre
Omar Sy – Adieu le Service Après-Vente
Ce natif des Yvelines, où il vit le jour il y a 36 ans, s’installe aujourd’hui avec femme et enfants (4) à Saint-Rémy de Provence. De quoi lui faire oublier son expérience américaine d’il y a peu. Couvert de prix prestigieux après Intouchables, Omar Sy s’est laissé tenter par Hollywood (X Men, Jurassic World) qui, à son habitude pour les Frenchies, lui a réservé des rôles mineurs. Pour l’heure il revient en force avec le personnage de Samba qui semble taillé à son attention. Avec près de 50 films et séries TV, il est devenu l’une des meilleures valeurs du box-office français.
Pour quel public ?
Vraiment tout public, non seulement pour la forme mais aussi pour le fond qui traite en filigrane de l’immigration.
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