Sur la Lune, ou sur Mars peut-être. Ou au bord du Léthé. Ou nulle part. Avec arbre.
Arbre étique, rochers, sol craquelé. Des os de poulet jonchent le sol à cour.
Qui sont ces deux charlots en jaquette et melon ? L’un, canne et belles chaussures pointues, est plus distingué que l’autre, qui fait tout une affaire de ses godillots. Un vieux couple qui ne se supporte plus, qui s’engueule, se soutient, s’embrasse, travaille du chapeau. Et la belle complicité du duo Francis Azéma – Denis Rey.
Qui est Pozzo, maître sans scrupules, patron abusif, autorité malsaine ? Le diable peut-être. Un diable en costume blanc. Le pourvoyeur d’os. Alain Dumas étale sa superbe, mange, boit, fume, hume, se gargarise, tonitrue et devient étrangement inquiétant en aveugle aux yeux vides.
Qui est ce Lucky bizarre, le paillasse en laisse ? Un ancien scientifique, un chercheur devenu fou par excès de h-index, un Professeur Tournesol qui aurait mal tourné, un Faust à bout de forces ? Il débite sa conférence, sans points ni virgules, sans queue ni tête, citations des pairs à l’appui. Fantastique Juan Alvarez, émouvant clown muet, qui tombe, se relève, porte, dépose, puis explose dans un torrent de mots.
Qui est cet éphèbe (Robin Azéma), ange, robot, petit prince ?
La nuit tombe, l’astéroïde B612 paraît.
C’est l’éternel recommencement du temps qui passe ou ne passe pas. Juste un os de poulet de plus qu’hier, un de moins que demain.
Les deux charlots, devenus ombres, s’en vont sans bouger.
Qui sommes-nous ? Pourquoi attendons-nous Godot ?
Photos © Marc Vionnet – Le Clou dans la Planche
Théâtre du Pavé, 20 avril 2014
Une chronique de Una Furtiva Lagrima.