Placé sous la direction de son chef, Tugan Sokhiev, l’Orchestre National du Capitole de Toulouse – ONCT – nous plonge dans l’univers musical du compositeur russe. A l’affiche aussi, « l’archet prodige » du jeune violoncelliste Edgar Moreau qui se couvre de gloire à chacune de ses prestations en concert ou en récital. Il interprète le Concerto n°1 pour violoncelle et orchestre, salle d’Odyssud le 1er avril, et, à la Halle, le 3, jour de ses 20 ans. BON ANNIVERSAIRE L’ARTISTE !!
Suivra la monumentale Symphonie n°8.
Ce même concert est donné le 2, à l’Auditorium de Bordeaux
Faut-il présenter encore notre Directeur musical de l’ONCT ? Pas un seul toulousain, et bien au-delà, n’ignore le nom de celui qui vient d’être nommé prestigieusement, tout récemment, Directeur musical de l’institution que représente le mythique Théâtre du Bolchoï. Avec un brin, toutefois, de crainte car quid des rapports futurs entre l’artiste et Toulouse ? Mais, notre petit doigt nous dit que l’aventure ne peut s’arrêter bientôt. Impossible ! Sinon, le peuple va ériger des barricades !
Edgar Moreau
Deuxième Prix à 17 ans du Concours Tchaïkovski 2011, sous la présidence de Valery Gergiev, où il reçoit également le Prix de la meilleure interprétation d’une œuvre contemporaine, Edgar Moreau est également lauréat du dernier Concours Rostropovitch en 2009 avec le Prix du Jeune Soliste.
Né le 3 avril 1994 à Paris, il commence le violoncelle à quatre ans ainsi que le piano, instrument pour lequel il obtient son prix au Conservatoire de Boulogne-Billancourt en 2010. Il poursuit actuellement ses études au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris dans la classe de Philippe Muller, ainsi que dans celle de Claire Désert pour la musique de chambre. Il a participé à des master-classes avec d’éminents violoncellistes et à de prestigieuses. En 2006, à onze ans, il se produit avec l’Orchestre du Teatro Regio de Turin…, le Svetlanov Symphonic Orchestra de Russie et le Sinfonia Iuventus Orchestra (sous la direction de Krzysztof Penderecki).
Edgar Moreau a été invité à jouer en récital en 2011 entres autres, au Concert Hall du Théâtre Mariinsky et en 2012 au festival Ludwig van Beethoven de Varsovie,.
Gidon Kremer le choisit pour participer au Chamber Music Connects the World en 2012 à Kronberg.
Edgar Moreau nourrit également un grand intérêt pour la musique de chambre.
En 2013, Edgar Moreau se produira en soliste à Moscou avec le Philharmonique de Moscou, à Caracas avec le Simon Bolivar Orchestra, et en musique de chambre aux côtés de Frank Braley et Renaud Capuçon au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence. « Révélation soliste instrumental de l’année » aux Victoires de la musique classique 2013, il est nommé dans la catégorie « Soliste instrumental de l’année » pour l’édition 2014 qui eut lieu le 3 février 2014 à Aix-en-Provence.
Prix de l’Académie Maurice Ravel et lauréat 2011 de la Fondation Banque Populaire, Edgar Moreau joue un violoncelle de David Tecchler de 1711.
Enfouie sous contraintes et persécutions, l’existence de Dimitri Chostakovitch aura été entièrement fidèle à la terre russe. Malgré la terreur psychologique institutionnalisée par le régime soviétique, le dernier Géant de l’écriture symphonique, l’orchestrateur virtuose, le formidable bâtisseur d’architectures disproportionnées laisse une œuvre considérable, universellement reconnue. Il demeure bien là comme le plus proche héritier de l’art d’un Gustav Mahler
Concerto pour violoncelle et orchestre n°1, en mi majeur, opus 107
I. Allegretto
II. Moderato
III. Cadenza
IV. Allegro con moto
Les trois derniers mouvements sont enchaînés faisant bloc.
Il fut créé à Léningrad le 4 octobre 1959 par un jeune prodige, Mstislav Rostropovitch, son inspirateur, sous la direction de l’incontournable chef Evgueni Mravinski à la tête du Philharmonique de Léningrad.
Le compositeur a écrit deux concertos pour chacun des trois instruments privilégiés de cette forme musicale, le piano, le violon et le violoncelle. Ceux pour violon et violoncelle seront directement inspirés par les virtuoses les plus accomplis du XXe siècle, David Oïstrakh et Mstislav Rostropovitch. Deux à chaque fois, il paraît difficile de parler de simple coïncidence : cette symétrie formelle fait pendant aux conceptions divergentes de la musique concertante qui s’y expriment.
Ce principe s’applique tout particulièrement aux deux concertos pour violoncelle, composés à sept ans d’intervalle, été 1959 pour le premier. De durée comparable, ils se ressemblent également par l’importance accordée au soliste et par l’orchestration réduite. On note l’absence de trompettes et de trombones, mais un cor tout de même ici. Cependant, leurs caractéristiques essentielles sont fondamentalement différentes.
Tandis que, le Concerto n°2 brille de toute cette originalité dont Chostakovitch a fait preuve dans l’immense majorité de ses œuvres, le Concerto n°1 est écrit dans l’esprit virtuose et ludique du divertimento classique, sous un masque caricatural, satirique et grimaçant.
Dés les premières mesures de l’Allegro, le soliste prend la main et la conservera tout au long du mouvement, qui n’est peut-être pas tout à fait « la marche humoristique » dont parlait le compositeur mais l’ostinato du violoncelle renforcé par un orchestre tourbillonnant a tout du bourdonnement irritant de guêpes, éveillant les répliques du seul cor. La berceuse nostalgique du Moderato évolue de la pudeur au pathétique pour s’effacer dans un dialogue violoncelle / célesta. Expression de réactions affectives ou ironiques, parfois proche du burlesque, la Cadenza, confiée au seul violoncelle, mène au Rondo, regroupant des éléments des précédents mouvements et finissant sur la marche initiale.
Le Concerto n°1 constitue la première œuvre de Chostakovitch enregistrée aux Etats-Unis en sa présence, et c’est en même temps le premier compositeur soviétique à avoir assisté à l’enregistrement d’un de ses propres ouvrages sur le sol américain, supervisant même son déroulement.
Quelques mots sur la Huitième en ut mineur, op. 65
I. Adagio 27’
II. Allegretto 6’
III. Allegro non troppo 6’
IV. Largo 10’
V. Allegretto 15’
Elle est dédiée au chef d’orchestre Evguéni Mravinski.
Elle fut créée à Moscou le 8 novembre 1943 sous la direction de son dédicataire.
Œuvre aux dimensions énormes, cette gigantesque fresque fut écrite en 40 jours. Quand le compositeur s’asseyait pour écrire une symphonie, elle était déjà terminée dans sa tête. Il ne faisait qu’écrire une partition déjà composée.
« Chaque symphonie de Chostakovitch est une époque et ses symphonies sont l’histoire de notre pays, l’histoire de l’Union soviétique et l’histoire de la Russie, ou plus précisément leur histoire exprimée sur le plan de la perception et de l’émotion. Le cycle correspond à des stations de notre vie. » Ainsi, témoignait M. Rostropovitch au sujet de la complicité qui s’était instaurée entre le compositeur et le public russe qui guettait, à chaque création, le message du musicien devenu chroniqueur de son temps, avec à chaque fois des prises de risque qui pouvaient se révéler fatales.
« J’ai voulu recréer le climat intérieur de l’être humain assourdi par le gigantesque marteau de la guerre. J’ai cherché à relater ses angoisses, ses souffrances, son courage et sa joie. Tous ces états psychiques ont acquis une netteté particulière, éclairés par le brasier de la guerre. » D. Chostakovitch, au sujet de cette Huitième, son « poème de la souffrance »
Comme la Septième Symphonie composée pendant le siège de Léningrad sous les bombardements de l’armée allemande, la Huitième appartient aux années de guerre. Son climax et ses accents ne pouvaient que s’en ressentir. Le compositeur est réfugié à Moscou. Il suit avec anxiété et peur, les événements de la bataille de Stalingrad, l’une des plus meurtrières de l’Histoire, six mois au bout desquels l’Armée rouge finira par reprendre l’avantage. Le régime soviétique attend alors de son musicien une sorte d’ode victorieuse à la gloire de l’armée et du peuple vainqueur. Ce sera tout le contraire. Amertume et désolation transpirent tout au long d’une œuvre de plus d’une heure, sans concession aucune. Si l’espoir est là, le fil est bien ténu.
« …On a le cœur serré dans l’adagio initial, en écoutant cette mélodie glacée des violons, qui se développent lentement, à l’infini. Peu à peu, la plainte désolée se change, à travers les déplorations de l’harmonie et les battements des tambours, en un vent de panique traversé d’étonnants relents de musique de foire pour retomber, par un solo de cor anglais, dans la tristesse initiale. Le scherzo, grimaçant et caricatural, emporté dans un mouvement tragique, précède une image symbolique, quasi dantesque, de la guerre, sous la forme d’une toccata, sorte des laminoirs des corps et des cœurs, mouvement perpétuel parsemés de cris d’horreur. L’œuvre se recueille en une passacaille, large et souterraine, sur laquelle s’enroulent des broderies de bois, d’où, peu à peu l’espérance va renaître en des visions idylliques encore timides, qui disent que, malgré l’horreur, la joie, un jour, pourra étreindre encore les hommes. » Jacques Longchamp – 1er février 1969.
Cette analyse correspond bien au discours nécessaire donné à sa création pour en permettre l’exécution en public, une pure absurdité intentionnelle, dixit, le chef Kurt Sanderling : « Ce ne sont pas les horreurs de la guerre, mais les horreurs de la vie qui sont le fond de cette symphonie, la vie d’un intellectuel dans les conditions qui régnaient à cette époque. Quant au Finale, Chostakovitch veut davantage évoquer un engloutissement dans l’éternité du néant par lassitude, plutôt que la foi dans la vie éternelle. » Prokofiev avait bien deviné les intentions du compositeur, ne se gênant pas pour ajouter sa voix pour que fut mise finalement à l’index cette œuvre «contre-révolutionnaire et anti-soviétique», «qui insiste beaucoup trop sur les aspects sombres et tragiques de la réalité » et fait montre « d’un pessimisme invétéré.» Aux critiques officielles qui accablèrent cette symphonie, un seul poète, Ilya Ehrenbourg, prit le risque de s’y opposer : «J’étais bouleversé en revenant du concert ; j’avais entendu soudain la voix du chœur antique des tragédies grecques…la musique possède l’immense avantage de pouvoir tout dire sans rien mentionner.»
Michel Grialou
Orchestre National du Capitole
Tugan Sokhiev (direction)
mardi 1er avril à 20h30 – Odyssud Blagnac
mercredi 02 avril à 20h00 – Auditorium de Bordeaux
jeudi 03 avril à 20h00 – Halle aux Grains Toulouse
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