Avant les représentations prévues dans quelques jours au Théâtre Jules-Julien, les acteurs du collectif FAR ont partagé avec le public du TPN une répétition de « la Fausse suivante », de Marivaux. Ambiance.
Le Théâtre du Pont-Neuf présente régulièrement des sorties de résidence de compagnies, ouvertes au public. Comme celle de « la Fausse suivante » de Marivaux, une création du FAR, nouveau collectif d’acteurs toulousains, qui eut lieu en décembre dernier. «Ce désir de présenter une étape de travail et de discuter ensuite collectivement avec le public est une démarche sociale qui bat en brèche l’idée de consommation du spectacle et de la culture en général. C’est une excellente idée de convoquer les spectateurs à une sortie de résidence pour voir comment se dégage la création à partir d’un texte et apprécier le processus de travail. En tant qu’enseignant, je viendrai assister à deux représentations de « la Fausse suivante »: d’abord avec mon groupe d’élèves en option théâtre et ensuite avec mes élèves de français à qui je fais étudier Marivaux. Ce seront deux approches différentes…».
Ce professeur de français est spectateur et comédien amateur. Il faisait alors connaissance au TPN avec le collectif FAR, constitué par les metteurs en scène et comédiens Laurent Pérez – directeur artistique du Théâtre du Pont-Neuf – Olivier Jeannelle, Denis Rey, Sylvie Maury et Cécile Carles. «L’idée de monter un collectif est très intéressante car elle pose la question du vivre ensemble, des liens, des regards différents, comme dans une classe d’élèves ! Il y a un engagement citoyen dans un collectif et le choix d’un auteur politique comme Marivaux comme première création lui correspond tout à fait», poursuit le spectateur.
L’ambiance était bon enfant ce soir du 21 décembre. Même si, sur le plateau nu, les comédiens revêtus de leurs vêtements personnels, texte en main, étaient intimidés. «On dit qu’on n’a pas le trac, mais on l’a quand même», annonçait dans un souffle Olivier Jeannelle, détenteur du rôle de Trivelin dans la pièce de Marivaux. Après trois quart d’heure de répétition publique, un bord de scène suivait où les questions des spectateurs fusaient sur la future mise en scène, le choix de la scénographie, des costumes, de la lumière et sur celui du texte. «Il nous fallait une pièce à cinq personnages. Nous avions tous envie de monter un classique mais avec des problématiques contemporaines : ceux des rapports de force, des sentiments et de l’argent», annonce Laurent Pérez.
« La Fausse suivante » est une pièce suffisamment structurée pour ne pas permettre d’interprétation subjective des uns et des autres. Même à cinq, il y a une lecture objective de la pièce», précise Olivier Jeannelle. Qui évoque aussi le système de Law dont Marivaux fut victime, ruiné par cette première forme de marché boursier : «Nous avons apprécié ces similitudes entre le XVIIIe siècle et notre époque. Les enjeux de cette pièce parlent à l’homme d’aujourd’hui». Jeu engagé et réaliste, environnement minimaliste, structuré par la lumière : tels sont les partis pris du collectif, basé sur un théâtre d’acteurs. Et Laurent Pérez de conclure : «On n’a rien à prouver sur Marivaux, on veut juste faire entendre sa langue. Il raconte assez de choses fortes sans que nous n’ayons à en rajouter. C’est lui qui nous guide. Au sein du FAR : pas de regard de metteur en scène, on laisse nos égos au placard et on y va». Après huit jours de résidence au TPN, ce travail en cours s’est poursuivi en janvier au Centre Culturel de Saint-Simon, puis sera présenté en février lors de cinq soirées au Théâtre Jules-Julien.
Sarah Authesserre
Une chronique du mensuel Intramuros
« La Fausse suivante », du 19 au 23 février, 20h00, au Théâtre Jules-Julien, 6, avenue des Écoles-Jules-Julien, Toulouse. Tél.: 05 81 91 79 19.