Indiana Jones en knickerbockers
Mélangeant astucieusement Le Crabe aux pinces d’or, Le Secret de la Licorne plus un zeste du Trésor de Rackham le Rouge, Steven Spielberg nous livre, enfin, son Tintin, celui auquel il rêvait depuis des dizaines d’années. Aujourd’hui il l’abandonne aux dernières trouvailles numériques, ici la « performance capture », entendez par là que les acteurs jouent effectivement mais que seuls leurs mouvements sont captés pour animer des personnages virtuels qui sont ensuite incrustés dans des décors numérisés. Personnages qui, soit dit en passant, transpirent passablement le bulgomme. Bon, ceci étant dit, que reste-t-il du Tintin dessiné par Hergé ? Certainement cette fraîcheur chez un personnage assurément plus complexe qu’il n’y paraît, ce qui fait d’ailleurs tout son charme. C’est le fantastique Jamie Bell de Billy Elliot qui lui prête son jeu et sa silhouette. Les autres figures sont là, du capitaine Haddock aux deux Dupont en passant par l’ineffable Nestor et la non moins mythique Bianca Castafiore à qui, chose étrange, Steven Spielberg a enlevé l’ air des bijoux qui lui a donné une stature d’icône de l’opéra, pour l’affubler de la valse de Juliette du Roméo et Juliette de Gounod ! Ne chipotons pas mais c’est un peu comme s’il avait enlevé les mille milliards de tonnerre de Brest du capitaine Haddock. Cela dit, les effets numériques sont bluffants, évidemment, le rythme ne faiblit pas une seconde et l’on se retrouve finalement dans une espèce d’Indiana Jones en caoutchouc assez sympa à vrai dire mais qui comble par une profusion effrénée d’images le vide d’un scénario qui joue ici les faire-valoir d’un blockbuster qui ne veut pas dire son nom. Il y aura certainement d’autres opus car ce type de produit, c’est bien connu, est fait pour tout âge, de 7 à 77 ans.
Robert Pénavayre