Les deux artistes russes annoncés alors comme violoniste et pianiste de demain sont bien au rendez-vous et se révèlent deux immenses artistes d’aujourd’hui. Partenaires réguliers en récital, ils sont manifestement à l’aise l’un avec l’autre, l’énergie impatiente et le tempérament plutôt fougueux de Repin semblant appeler la réflexion maîtrisée et le caractère plus posé de Lugansky. Les trois œuvres au programme permettent de les réunir une fois de plus.
C’est parce que la Deuxième Sonate en sol majeur de Grieg représente une couleur différente qu’ils ont choisi cette œuvre, plutôt que sa plus populaire Troisième, pour prendre place en première partie de programme avant la vaste perspective de la Sonate en la majeur de César Franck. Chef-d’œuvre incontestable de la musique de chambre française du XIXè, elle fut composée en 1886. Au sujet de Grieg : « C’est un peu comme du Mozart du XIXè siècle, une écriture très vraie, naturelle. Ses émotions sont des reflets directs » nous explique Vadim Repin tandis que Nikolaï Lugansky renchérit et nous dit : « C’est incroyablement frais, naïf et très sage en même temps. C’est une musique ensoleillée, simple, ouverte, qui a néanmoins un côté profond. Quant à Franck, il a un monde intérieur très intense, intime, mais il sait aussi regarder au-delà pour juger de l’ensemble du tableau. Normalement, un compositeur romantique n’est capable que de voir son propre monde. Mais Franck, peut-être en raison de ses croyances religieuses, savait que c’était simplement une partie du miracle entier de la création. Il voit ses propres sentiments, mais aussi le lever du soleil et le crépuscule. Sa musique reflète tout le cosmos. »
D’écriture plus tardive puisque composée en 1918, la Sonate en mi mineur d’Edward Elgar complète le programme.
Michel Grialou
jeudi 17 mars – Halle aux Grains