C’est une forme de consécration. Le jeune chef d’orchestre Tugan Sokhiev, “patron“ de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse, dirige un concert de Grands Interprètes. Il est des artistes pour qui la valeur n’attend pas le nombre des années. En ce sens, et sans perte de temps aucune, le musicien d’origine ossète est bien dans la lignée des grands chefs russes qui ont tenu et tiennent le haut du pavé.
Ambitieux, il l’est, inspiré, aussi, animé d’une “sacrée“ énergie, aussi, charismatique ? il suffit d’observer les musiciens de son orchestre, et le public, pour avoir la réponse. Après l’histoire d’amour avec Michel Plasson, c’est la passion avec son successeur dès le premier contact. Qui va s’en plaindre ?
Le concert est tout Beethoven. L’orchestre, c’est le Mahler Chamber Orchestra. Fondé en 1997 par les musiciens eux-mêmes, il est un ensemble unique de qualité exceptionnelle dirigé par les plus grands chefs. Après une mise en bouche avec Coriolan, ouverture parmi les plus célèbres du compositeur, qui frappe par son intensité dramatique et sa concision, c’est le Concerto pour piano n°5, œuvre somptueuse, colorée, chargée d’une intense émotion, d’une grandeur olympienne, méritant amplement sa très grande popularité. Il faut au clavier un “grand“. C’est Nicholas Angelich, le plus français des pianistes américains, un habitué de la Halle, qui va aborder en véritable nageur de fond ce flot musical à l’écriture pianistique particulièrement dense. En effet, les dimensions du n°5 dépassent tous les canons traditionnels. Alors, comment se laisser guider par le flux sans dériver mais en captant à son profit la force du courant ? « Suivez simplement le mouvement » lui a-t-on conseillé un jour. L’artiste n’a pas oublié. Suivre le mouvement, mais vers le haut, tout au long de ce marathon héroïque de quarante minutes en trois mouvements.
La Symphonie n°7 occupe la seconde partie. Elle fait partie des grandes symphonies impaires caractérisées par leur vigueur, leur tension, leur rythme, ce dernier étant bien la caractéristique essentielle de cette Septième. Tout au long de ses quatre mouvements, elle déborde d’une énergie rythmique considérable, qui va parfois jusqu’à une sorte d’ivresse, une vraie jubilation, pour se clore par une étourdissante coda. N’a-t-on point parlé d’ « apothéose de la danse » pour cette n°7 ?
Michel Grialou
Grands Interprètes – Halle aux Grains – 20h le 11 février