Un livre d’Yves Gabay, Toulouse, les années tubes, ressuscite l’époque où la ville rose trustait le Top 50.
C’est un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. A partir du mitan des années 80 et jusqu’au début des années 90, une cohorte d’artistes et de groupes made in Toulouse occupèrent insolemment les ondes, les télévisions et les hit-parades. Ils s’appelaient Gold, Images, Jean-Pierre Mader, Pauline Ester, Kazero, Art Mengo, Pacifique… Les radios dites libres proliféraient, Canal + diffusait le Top 50, M6 passait en boucle les clips kitsch et colorés de la nouvelle scène musicale française sur laquelle donc les Toulousains s’illustrèrent spectaculairement.
Yves Gabay retrace cette histoire avec précision, remonte le fil, rappelle l’importance de studios, de producteurs, de musiciens qui ont permis l’éclosion de cette parenthèse musicale enchantée. Il est allé à la rencontre de ces artistes qui furent des stars et dont certains égrènent encore aujourd’hui, lors des tournées surfant sur la nostalgie de cette époque, leurs tubes d’antan. En lisant Toulouse, les années tubes (éditions Atlantica), on devine que l’auteur n’était sans doute pas client de cette musique à l’époque et que ses goûts le portaient plutôt vers la pop anglo-saxonne (sinon comment comprendre la mention de Prefab Sprout, archétype du groupe pour happy few, dans l’ouvrage ?).
C’est précisément cet écart qui donne au livre la bonne distance avec son sujet. Il ne s’agit pas de l’œuvre d’un fan, mais de celle d’un passionné qui veut comprendre les choix et les destinées d’autres passionnés. De fait, Yves Gabay évoque avec empathie et sensibilité les aventures humaines, les rencontres, les ruptures qui émaillèrent la vie de groupes et d’artistes dont mélodies et paroles résonnent toujours dans nos oreilles. Comme lui, il est difficile au lecteur de rester indifférent à la sincérité, l’engagement, l’enthousiasme, la lucidité d’artisans musiciens – « faire sérieusement des choses pas sérieuses » selon l’expression de Jean-Pierre Mader – consacrés, parfois malgré eux, par le succès.
Le sous-titre du livre annonce « La bande-son d’une génération ». L’expression est bien choisie. Elle cerne parfaitement la discrète et douce nostalgie qui, dans le sillage d’un Nick Hornby, se dégage de Toulouse, les années tubes.