Detroit, un film de Kathryn Bigelow
Nous savons tous aujourd‘hui combien Kathryn Bigelow est un personnage important dans l’univers du 7ème art contemporain. En lettres de feu elle a inscrit dans son Histoire Démineurs et Zero Dark Thirty. Le premier nous mettait sur les pas d’un démineur chargé de désamorcer des bombes sous le feu meurtrier de snipers en Irak. Le second narrait la traque ultime de Ben Laden.
Will Poulter
Deux uppercuts dans le plexus dont nous avions un peu de mal à nous remettre. Inutile de vous le cacher, Detroit vous laissera dans le même état : groggy, abasourdi, lessivé. Pour ce faire, la réalisatrice remonte le temps et plante sa caméra au cœur des émeutes qui ravagèrent des quartiers entiers de Detroit, principale ville du Michigan, en juillet 1967.
Avec trois à quatre caméras entourant les personnages, les lieux, l’action aussi bien sûr, filmant avec une urgence perceptible ce maelström au racisme affiché qui a fait 43 morts et près de 500 blessés, elle fait de nous des témoins sidérés. Pour nous relater cette barbarie des temps que l’on pensait anciens, Kathryn Bigelow se focalise sur la tuerie qui s’est déroulée dans l’Algiers Motel le 23 juillet 1967. C’est là que se sont réfugiés des Noirs pris dans l’engrenage d’une violence aveugle. Parmi eux le chanteur des Dramatics, Larry Leed. C’est de là qu’un coup de feu serait parti en direction de la Police. Rapidement investi, le motel va devenir un véritable enfer pour une poignée d’hommes noirs et de femmes blanches accusées de prostitution. Durant des heures aussi interminables qu’angoissantes, les policiers vont essayer de leur faire dire qui avait tiré.
En vain, et pour cause. Ils jouèrent alors « au jeu de la mort », selon leurs propres propos. Malgré les cadavres, les éléments accablants et l’absence totale de respect des droits civiques, personne ne sera poursuivi selon le verdict d’un jury… entièrement blanc.
Ce film s’inscrit dans la meilleure veine de ce que le cinéma peut produire en tant que passeur de mémoire. Et il n’est rien de dire que les derniers événements que vit l’Amérique post Obama doivent trouver ici de quoi faire largement réfléchir, même si son succès Outre –Atlantique est moins que moyen… A l’écran, des acteurs sidérants dont John Boyega et Will Poulter. C’est ce dernier qui endosse le rôle terrifiant de Krauss, le policier qui mena cet interrogatoire aux portes de l’enfer.
L’un des grands films de cette année !
Robert Pénavayre
Detroit – Réalisateur : Kathryn Bigelow – Avec : John Boyega, Will Poulter, Algee Smith…
Kathryn Bigelow – La grande réalisatrice de notre temps
Cette Californienne qui fut, pendant trois ans, l’épouse de James Cameron, se destine, dans un premier temps, à la peinture. C’est Andy Warhol qui lui conseille le 7ème art. Riche idée car, le temps passant, Kathryn va affirmer un regard cinématographique particulièrement aigu que le succès planétaire de Démineurs en 2008, elle a alors 57 ans, va inscrire dans le marbre avec ses 75 prix internationaux et ses 6 Oscars. En 2012, Zero Dark Thirty est un autre triomphe. Le film sous rubrique part dans la même direction. Vraiment une très grande réalisatrice !