C’est sous le signe de la « Danse rythmique » que la grande guitariste espagnole Margarita Escarpa participait au quatrième rendez-vous de la saison Toulouse Guitare fondée par Thibaut Garcia. Le 15 mars dernier, la salle du Sénéchal de Toulouse recevait donc celle qui parcourt le monde et impressionne par la tranquille assurance de sa musicalité.
Comme le rappelle Jules Garcia, Président de l’association Toulouse Guitare, à l’ouverture de cette soirée, Margarita Escarpa a remporté de nombreuses récompenses internationales, dont le prestigieux Guitar Foundation of America l’année même de la naissance de Thibaut Garcia qui l’a également remporté en 2015 ! Cette belle artiste, sensible et d’une émouvante musicalité, a préparé pour cette soirée un programme musical d’une diversité et d’une ouverture remarquables.
Néanmoins, la première partie du concert, suivant la tradition établie dès la première saison de Toulouse Guitare, est animée par deux jeunes guitaristes en cours de formation, Robin Tahar et Louis Michaud, étudiants à l’IsdaT, qui se sont rencontrés à Toulouse en 2022 dans le cadre de leurs études. Ces jeunes musiciens abordent les œuvres de trois compositeurs aux styles divers. Dès la pièce intitulée Imagens du Nordeste (Images du Nord-Est), du Brésilien Celso Machado, les jeux des deux guitaristes se mêlent avec une cohésion et une précision impressionnantes. Comme si un seul musicien jouait les deux guitares. Leur sens des nuances se combine bien avec la virtuosité que réclame la pièce suivante de Joaquín Rodrigo, Tonadilla, aux trois volets évocateurs de danse. Dans la courte partition de Tōru Takemitsu, A boy named Hiroshima, qui conclut leur prestation, ils expriment bien cette nostalgie sensible qui prend ici un rythme de valse mélancolique.
L’arrivée sur scène de Margarita Escarpa ouvre un panorama musical sans limite. La première pièce, de Juan Andres de Mendoza, date de la fin du XVIème siècle. Intitulée Honze diferencias de folias cette série de variations autour du thème de la folie, met en évidence la pure beauté sonore de l’interprète, le raffinement de son jeu et son sens des nuances. La séquence suivante plonge l’auditoire dans une atmosphère de danse avec la légèreté du Fandango variado op. 16 de Dionisio Aguado, et la Sonatina en la majeur de Federico Moreno-Torroba. On admire en particulier la douceur ineffable de l’Andante, comme une confidence murmurée.
Les deux pièces suivantes constituent un hommage fervent de l’interprète à la grande guitariste Ida Presti. La Sarabande pour Guitare de Francis Poulenc, dédiée à Ida Presti, révèle la touchante sensibilité du compositeur qui dévoile là un aspect inhabituel de sa personnalité. La Danse rythmique pour Alexandre Lagoya est signée Ida Presti elle-même. La vivacité de son rythme évoque un hommage fervent.
Quatre valses aux caractères divers s’enchaînent avec tout d’abord une transcription de Margarita Escarpa elle-même du 4ème Nocturne pour piano, Bal fantôme, de Francis Poulenc. La Valse à Royan du guitariste français d’aujourd’hui Fred Alan Ponthieux introduit une douceur nostalgique avant les Dos Valses venezolanos d’Antonio Lauro, transcrites par Alirio Diaz.
Pour conclure ce programme multicolore, Margarita Escarpa plonge la salle dans un feu d’artifice d’effets divers suscités par la pièce intitulée Apontamentos sobre as folias, de Fernando N. Lobo. Retrouvant ainsi la folie évoquée dans la première œuvre de ce récital, la musicienne boucle la boucle sur ce clin d’œil en forme de sourire.
Le grand succès de sa prestation obtient un bis joyeux et lumineux : Maria (Gavotte) de Francisco Tárrega.
Un autre beau moment de Toulouse Guitare dont le prochain et dernier concert de la saison sera donné en la Chapelle des Carmélites le dimanche 5 mai à 17 h par le luthiste Thomas Dunford.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse