Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
L’Appât d’Anthony Mann
Sorti en 1953, L’Appât fait partie de la longue série de westerns d’Anthony Mann devenus des classiques à l’instar de Winchester 73, Les Affameurs, Je suis un aventurier ou L’Homme de l’Ouest et le cinéaste retrouve ici son acteur de prédilection James Stewart (huit films ensemble). Dans le Colorado, peu après la fin de la Guerre de Sécession, Howard Kemp est sur la piste de Ben Vandergroat, un bandit ayant tué un marshal et dont la capture offre une récompense de 5000 dollars.

Dans sa quête, Kemp se voit rejoint malgré lui par Tate, un vieux prospecteur d’or, et Anderson, un ex-officier nordiste poursuivi par les Indiens pour avoir violé l’une des femmes de leur tribu. Ce trio inattendu met la main sur le malfrat en fuite accompagné par une jeune femme, Lina, amoureuse de lui. Les chasseurs de primes doivent rejoindre le Kansas pour remettre leur prisonnier, mais une longue route ponctuée d’embûches et de trahisons les attend…
Appât du gain
Dès ses premiers plans, L’Appât nous montre une nature aussi splendide que sauvage sans user pour autant, à l’inverse de nombre de westerns de l’époque, de la majesté du cinémascope. Economie de moyens et efficacité maximale seront les lignes de conduite – et de mise en scène – d’Anthony Mann. Cinq personnages, des décors naturels, une intrigue aussi simple qu’une tragédie antique suffiront à transformer le film en modèle du genre. Jalousies et rivalités minent les relations entre les geôliers tandis que Ben (formidable Robert Ryan alternant charme et cynisme absolu) souffle sur les braises sous le regard enamouré de sa dulcinée. Celle-ci (Janet Leigh) n’est cependant un banal faire-valoir et va devenir le véritable révélateur de la valeur morale des différents personnages. A ce titre, James Stewart, à mille lieux de l’Américain modèle qu’il a souvent incarné, interprète un homme amer, fragile, au passé trouble, attiré comme ses compagnons d’infortune par le magot représenté par son prisonnier.

C’est d’ailleurs l’argent (et la cupidité) qui est sans doute le personnage principal de L’Appât, nous rappelant au passage que la nation américaine s’est bâtie sur le dollar et le colt. Les éléments aussi jouent un rôle essentiel. Montagnes, canyons, torrent, forêts ne sont pas que de simples décors, mais les acteurs – tour à tour protecteurs ou menaçants – d’un scénario impeccablement mené. On retrouvera une telle symbiose entre nature et récit dans le formidable Délivrance de John Boorman. Cependant, chez Anthony Mann, dont l’art du cadrage et du gros plan est ici éclatant, la rédemption l’emporte sur le mensonge, la décence sur la sauvagerie.
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