Le comédien et réalisateur Mathias Mlekuz a vécu un drame personnel avec le suicide d’un de ses fils. Pour lui rendre hommage, il décide de refaire, sur ses traces, un voyage à bicyclette, de La Rochelle à Istanbul. Et de filmer le tout, sous forme d’un docu-fiction, avec la complicité de Philippe Rebbot.
Le point de départ de « A bicyclette ! » est le plus terrible qui soit. Comment, pour un parent, survivre au décès d’un de ses enfants, particulièrement quand celui-ci s’est suicidé sans laisser la moindre explication ? Mathias Melkuz y répond par un film, touchant, forcément, douloureux, évidemment, mais aussi très drôle. Car l’acteur et réalisateur a voulu panser ses plaies – si tant est qu’on n’y arrive jamais – en embarquant son copain Philippe Rebbot dans un long périple à bicyclette, celui-là même que Youri, le fils tant aimé, avait effectué cinq ans plus tôt. Les deux zèbres se connaissent depuis longtemps, installant une complicité de chaque instant, ce qui donne des échanges aussi tendres que poilants. Dire qu’ils sont taillés pour l’aventure serait très exagéré. Mathias, s’il part bien équipé, a pas mal de kilos en trop et une gourmandise qui colle mal à l’effort sportif. Philippe, dont on connaît bien le côté mec cool planant à dix mille, pédale parfois en costard-cravate et carbure au whisky et au rosé. Sans oublier les clopes qu’il enchaîne au mépris de l’exploit à accomplir. Cahin-caha, les deux potes vont néanmoins relever le défi…
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Mathias Mlekuz et Philippe Rebbot dans « A bicyclette! ». Photo Emmanuel Guimier
Sur les routes et les chemins – et parfois en bus et en train – Mathias et Philippe font face à l’adversité. Ils admirent les paysages, visitent des églises (dont Saint-Mathias à Budapest), font des rencontres étonnantes (comme ce photographe normand installé au fin fond de la Roumanie). La musique qui les accompagne est pimpante, les images soignées (belles lumières du soir) malgré le dispositif qu’on imagine artisanal. Certes, il y a un peu de répétition dans les péripéties vélocipédiques. Et les dialogues au fil de l’eau sont parfois un peu légers pour dire l’intensité de la perte et de la douleur, évoquer le sens de l’existence et sonder les mystères de la mort – mais n’est-ce pas ainsi dans la vraie vie quand les mots ne peuvent rien face à la tragédie ? Mais on ressent une telle tendresse entre Philippe Rebbot et Mathias Mlekuz. Et l’on rit avec eux quand le voyage apporte son lot de surprises (hilarant séjour à Vienne chez une jeune femme, très rigide sur le plan domestique mais plus que libérée quand il s’agit de se baigner). Mathias Mlekuz demande à son ami : « Suis-je un homme bien ? Et puis c’est quoi être un homme bien ? » « Oui », trois fois « oui » lui répond-on en pensée quand on sort de ce film-confession entre le rire et les larmes.
« A bicyclette ! », de Mathias Mlekuz, au cinéma mercredi 26 février.