Invisibili d’Aurélien Bory : un bouleversant conte visuel sur l’intemporalité de la condition humaine face à la maladie et à la mort
Aurélien Bory a découvert à Palerme la grandiose fresque du XV° siècle « Le triomphe de la mort « . Une oeuvre à la fois fascinante et mystérieuse qui représente la chevauchée de la Mort surplombant toute une série de personnages : nobles, pauvres, religieux, malades, musiciens,….Grâce à un dispositif technique sophistiqué, cette œuvre est projetée grandeur nature (6 mètres sur 6 ) sur un rideau de scène placé sur un cadre en mouvement perpétuel avec lequel cinq danseurs (quatre italiennes et un africain) et un saxophoniste interagissent. Tantôt dansant devant la fresque, tantôt s’enroulant dans celle-ci au point de s’incorporer dans l’action représentée, ils incarnent des personnes aux prises avec la maladie. Cette subtile superposition des artistes et des personnages peints souligne de façon saisissante l’intemporalité de la fragilité de l’existence humaine. Et l’émotion grandit encore d’un cran lors d’une dernière scène représentant avec sobriété la mort de migrants traversant la mer dans un canot pneumatique noir. …Avec cette dernière création, Aurélien Bory démontre à nouveau son talent protéiforme de maître d’un théâtre physique et existentiel, où la technique scénographique se fait discrète pour se mettre au service d’un propos profondément humain.
Un spectacle de la Compagnie 111 vu le mardi 5 novembre au Théâtre de la Cité
Hecube ou pas Hecube, par la Comédie française et Tiago Rodriguez :
Quand la vie réelle d’une comédienne s’invite dans son travail de répétition d’une tragédie antique
Ce spectacle est l’un de ceux qui ont marqué le festival « in » d’Avignon en juillet 2024, avec la rencontre entre le metteur en scène et directeur du festival Tiago Rodriguez et la troupe de la Comédie Française. Cette création théâtrale nous permet d’assister au travail d’une troupe de comédiens en train de répéter Hécube, la tragédie antique d’Euripide. L’intrigue antique met en scène le personnage d’Hécube, qui dans la défaite de Troie a tout perdu, à commencer par ses enfants. La comédienne principale qui interprète Hécube vit dans sa vie réelle un drame analogue : son fils est autiste et il a fait l’objet de maltraitance de la part du personnel de la structure dans laquelle sa mère l’a placé : nous assistons au combat de cette mère contre l’institution.
Le spectacle établit ainsi de subtils et puissants échos entre vie réelle et théâtre ce qui a le don de rendre actuel et incarné la tragédie antique.
La qualité remarquable de ce spectacle repose non seulement sur ces allers-retours savamment imaginé par Tiago Rodriguez, mais aussi sur l’impeccable interprétation de la troupe de la Comédie Française ou nous retrouvons sur scène la formidable et émouvante Elsa Lepoivre dans le rôle principal , ainsi que les excellents Denis Podalydès, Eric Genovèse et Loïc Corbery.
Un spectacle de la Comédie Française vu le samedi 16 novembre au Théâtre de la Cité
La création mondiale de l’opéra Voyage d’Automne : un fantasmagorique diamant noir signé Bruno Mantovani
Cette création est une réussite complète : la musique tranchante de Mantovani, l’intrigue mettant en scène cinq célèbres écrivains français collaborant avec le régime nazi pendant l’occupation, la mise en scène sobre de Marie Lambert-Le Bihan…..Vous pourrez découvrir ma critique complète de cette création sur le site internet Bachtrack.
Un spectacle de l’Opéra National du Capitole vu le vendredi 22 novembre
Qui som ? Un généreux, foutraque et dynamisant spectacle total interrogeant le présent et l’avenir de nos existences et de notre société.
Présenté au Théâtre de la Cité avec le Théâtre Garonne, ce spectacle créée par la compagnie toulousaine Baro d’evel a lui aussi marqué le festival d’Avignon en juillet 2024, Qui sommes nous ? Et surtout : où allons nous ? Ce sont les deux questions que se posent, que nous posent la compagnie franco-catalane avec beaucoup d’originalité, de créativité et de générosité.
En mélangeant dans leur grande « marmite de création » une équipe pluridisciplinaire et talentueuse de circassiens, comédiens, danseurs, musiciens, Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias inventernt des spectacles hors normes traitant de thèmes existentiels et sociétaux , abordant à la fois ce qui nous relie et ce qui nous dépasse avec décalage, humour mais également avec gravité. Basé sur une scénographie faite de pots en céramique signés Benjamin Porcedda , ce spectacle est rythmé par des séquences mystérieuses d’artistes aux prises avec une énorme baudruche. Le texte – en apparence décousu – est constitué de bribes de phrases non terminées interprétées avec un naturel déconcertant par l’étonnante Camille Decourtye. Ce texte procède ainsi par suggestion, permettant au spectateur de s’incorporer aux questionnement, comme une invitation à terminer les phrases et à s’interroger sur notre présent et notre avenir. IL traduit le désarroi qui nous habite devant les désordres sociétaux, écologiques, géopolitiques qui agitent le monde et nos consciences. Après plusieurs séquences étonnantes, mystérieuses ou savoureuses de théâtre physique et circassien, ce collectif d’humains est submergé par un déluge de bouteilles de plastique qui envahit le plateau à la fin du spectacle . Mais bien loin de céder à un renoncement et à un pessimisme sur le futur de l’humanité, cette tribu finit par se retrousser les manches et reprend le combat contre l’adversité , affirmant que l’histoire n’est pas écrite et qu’il nous appartient de nous bagarrer pour que la vie continue !
Si bien qu’ à la fin du spectacle , le discours décousu et hésitant du début devient une harangue proférée dans un porte-voix par une Camille Decourtye de plus en plus déchaînée, accompagnée par la fanfare survoltée réunissant tous les artistes….Cette fanfare débridée nous précède dans le hall du théâtre et joue pour un public médusé pendant plus de trente minutes, jusqu’ à l’épuisement des artistes….Et l’on ressort de ce spectacle hautement énergisant avec une sacrée dose d’optimisme et une furieuse envie de vivre !
Un spectacle de la Compagnie Baro d’Evel vu le 3 décembre au Théâtre de la Cité
Les ébouriffantes « Quatre saisons dansées » signées Julien Chauvin et Mourad Merzouki :
Ce jubilatoire concert dansé est un modèle du genre, et une réussite totale. Une nouvelle étape pour Julien Chauvin et son Concert de la Loge qui enchaînent les créations et les succès . Et un spectacle qui rompt toutes les formes de frontières existant entre le hip hop des danseurs de Mourad Merzouki et les musiciens de l’orchestre. Vous pourrez découvrir ma critique complète de cette création sur le site internet Bachtrack.
Un spectacle de Julien Chauvin et Mourad Merzouki vu le lundi 16 décembre présenté par Grands Interprètes à la Halle aux grains
La musique de chambre au sommet avec Martha Argerich and friends :
Retrouver la grande Martha en compagnie de quelques-uns de ses amis artistes est toujours un moment exceptionnel de musique de chambre, une fête pour l’esprit et pour les sens, le tout dans un climat de complicité et d’amitié . Et le concert présenté ce soir par Grands Interprètes n’a pas dérogé à ce bel état d’esprit ! Vous pourrez découvrir ma critique complète de cette création sur le site internet Bachtrack.
Un concert vu le vendredi 20 décembre présenté par Grands Interprètes à la Halle aux grains
Il me reste à vous souhaiter une excellente année 2025, pleine de joie, de rencontres et de beaux spectacles ! Et pour bien démarrer l’année, voici ma sélection de spectacles à ne pas manquer en janvier et début février 2025 à Toulouse
> du 22 au 25 janvier : Odyssud au Théâtre de la Cité : 20 000 lieues sous les mers
> du 24 janvier au 2 février : Opéra National du Capitole : Offenbach : Orphée aux enfers
> Dimanche 9 février à 17h : Eglise des 7 deniers / Festival Cuba Hoy : Coro Sambado, Ensemble A bout de souffle et Samba résille