La Nuit se traîne, un film de Michiel Blanchart
Le cinéma d’Outre-Quiévrain, nous le savons depuis longtemps, est capable de surprises énormes. Avec le premier long du Belge Michiel Blanchart, ce cinéma-là nous prouve, en même temps que sa vitalité, la puissance de feu de sa nouvelle génération avec un thriller signé d’un tout juste trentenaire !
Mady est étudiant le jour et, pour gagner sa vie et certainement payer ses études, serrurier la nuit. Il se fait payer en cash 250€ par intervention. Le coup de fil qu’il reçoit en pleine nuit provient de Claire, une jeune femme qui a perdu ses clés. Rendez-vous pris, il se trouve devant ladite porte et demande, d’abord, à être payé. Pas de chance, le portefeuille de Claire est à l’intérieur. Entre jeunes, on se comprend… Mady finit par ouvrir mais pas de chance encore, Claire n’a pas de liquide. Elle demande à Mady de l’attendre un moment, laisse l’appartement ouvert et descend, en même temps que son sac poubelle, chercher du liquide au distributeur voisin. Mady entre dans l’appartement et reçoit, presqu’aussitôt, un appel alarmant de Claire. Il doit quitter l’immeuble immédiatement. Près à obtempérer, Mady file vers la porte. Trop tard… Le voici entre les mains d’un individu à l’évidence plus que dangereux. Menotté et malmené, il fait à présent face à Yannick, le chef du gang. Ce dernier lui réclame l’argent ayant disparu de l’appartement. Ce pauvre Mady n’en sait fichtre rien mais il est prêt à collaborer tout de même pour sauver sa peau et donne le signalement de Claire. C’est le début d’une longue et nocturne traque, limitée temporellement à une seule nuit, dans un Bruxelles en effervescence suite à des bavures policières.
Autant vous prévenir, vous ne verrez pas passer les 91’ de ce film car tout ce qui le construit est abouti de manière virtuose : lumières, cadrages, montage, direction d’acteur, musique, bande son d’une précision clinique, rythme. Du vrai cinéma comme on l’aime, qui ne se prend pas la tête mais qui envahit la nôtre pour notre plus grand plaisir. D’autant qu’il est porté par des comédiens au cordeau. Et tout d’abord Jonathan Feltre, un stupéfiant Mady un temps sidéré par son aventure mais qui finit par trouver l’énergie du désespoir pour s’en sortir. Assez inattendu dans le méchant de service, Romain Duris est d’autant plus terrifiant que sa filmographie en a plutôt fait un gentil garçon. Il faudrait tous les citer : Natacha Krief (Claire), Jonas Bloquet (son frère Théo dans une composition saisissante) …
Tant pis pour les grincheux qui souligneront des ficelles scénaristiques un peu épaisses, c’est qu’ils seront passés à côté de l’essentiel, un cinéma de genre qui vous prend à la gorge sans autorisation et vous laisse pantelant, vous demandant ce qui vous est tombé dessus !